Les luttes de clans au sommet se sont désormais propagées dans l'institution militaire elle-même», estime le président du RCD, Mohcine Belabbas. Commentant les derniers événements, marqués par le limogeage du patron du DRS, le général Toufik, il les qualifie, d'emblée, de «remue-ménage inédit» et de «règlement de comptes» qui restent loin des aspirations et de la demande de la classe politique appelant à l'abolition de la police politique. «Depuis le mois de mai, la crise politique qui frappe le pays est entrée dans une phase qui entraîne l'ensemble des institutions de l'Etat dans des positionnements aux conséquences imprévisibles et périlleuses pour la cohésion nationale. Les luttes de clans au sommet de l'édifice institutionnel se sont désormais propagées dans l'institution militaire elle-même», déclare-t-il devant les membres du conseil national du parti, réunis hier en session ordinaire. Refusant de reprendre à son compte les «interprétations» et les «suppositions» faites après l'annonce de la mise à la retraite du puissant patron du DRS, Mohcine Belabbas estime que «ce remue-ménage se déroule loin des intérêts nationaux». Mais, dit-il, ce fait est «inédit» dans la mesure où il révèle au grand jour «les luttes de sérail» et surtout la remise en cause de «la cohérence dans le commandement de l'armée qui a été sauvegardée, y compris dans les dures années du terrorisme». Poursuivant sa lecture de l'événement de la semaine, l'orateur relève «une volonté de faire croire à l'opinion, que le sort des généraux se confond avec l'avenir de la nation». «Les provocations récurrentes en Kabylie et le maintien de l'abcès de fixation de violence dans la vallée du M'zab ne peuvent être fortuits. La mort de prévenus dans les prisons de Ghardaïa et l'emprisonnement de militants pour leur appartenance partisane ne sont pas des faits anodins, même si l'actualité s'est exclusivement et maladroitement braquée sur le destin de généraux de tous ordres», souligne-t-il. «Les partis et les militants, victimes de la police politique» Dans ce sens, le leader du RCD estime que ces changements sont loin des aspirations. «A propos de cette actualité, le naufrage pensé et programmé du DRS est loin des revendications maintes fois exprimées de la dissolution de la police politique du régime. Les partis et les militants, victimes de cette police politique, ne peuvent se suffire de règlements de comptes entre protagonistes d'un système qui a mené le pays à la ruine», indique-t-il. Et d'ajouter : «La souveraineté du peuple et la démocratie exigent l'abolition de cette structure alégale et le contrôle par la représentation populaire des instruments de sécurité du pays.» Dans ce sens, le président du RCD appelle à «l'ouverture d'un débat démocratique, impliquant tous les acteurs, sur la restructuration des services de sécurité». Mohcine Belabbas déplore, cependant, l'absence de contre-pouvoir formel ou informel, qui est une menace sur l'Etat national. «Un Etat fort est celui qui dispose d'institutions crédibles et légitimes, et est consolidé par des contre-pouvoirs», lance-t-il. Réitérant l'attachement de son parti à la Coordination pour les libertés et la transition démocratique (CLTD), Mohcine Belabbas appelle ses partenaires à faire davantage d'efforts sur le terrain «pour constituer le rapport de force nécessaire afin de contraindre les tenants du pouvoir à s'asseoir à la table des négociations». Ghardaïa : «Une cabale politico-juridique contre les militants» Abordant la situation économique du pays, Mohcine Belabbas précise que « la crise financière de l'Etat ne sera pas résolue par ceux qui nous ont mis dans cette situation». «Vous le savez autant que moi, la nature de la crise est d'abord politique. Elle s'appelle illégitimité des dirigeants, discrédit des institutions, vacance de pouvoir, déficience de contre-pouvoirs, népotisme, corruption… et c'est pour cela que les solutions politiques doivent précéder les solutions économiques», indique-t-il. «Durant tout l'été, le chef de l'Etat, incapable d'insuffler une dynamique de renouveau politique ni une réponse au naufrage économique dans lequel sa gestion a plongé le pays, a choisi de meubler l'actualité par des limogeages et des nominations tous azimuts (…) qui ne font qu'accentuer la méfiance et le marasme ambiants», enchaîne-t-il. Le président du RCD revient, dans la foulée, sur la situation dans la wilaya de Ghardaïa où, dit-il, «la mort de détenus et l'emprisonnement des militants politiques ne sont pas des faits anodins». Cette question a été abordée, plus longuement, par Fetta Sadat, membre du collectif d'avocats du secrétaire national du parti, Hadjadj Nacereddine et du militant Kerrouchi Nouredine. L'avocate souligne, à cet effet, l'absence de respect des droits de la défense et dénonce «une cabale politico-juridique qui a visé des militants politiques et des droits de l'homme».