Le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Mohcine Belabbas, a été hier l'invité du forum du quotidien Liberté. Pour lui, le sort des généraux, allusion faite au départ du patron des Services de renseignement (DRS) et l'emprisonnement de deux autres, «ne se confond pas avec celui du pays». «Pourquoi on ne donne pas aussi d'importance aux militants politiques et aux journalistes qui ont été arrêtés», s'interroge l'invité du forum de Liberté, qui dénonce ce qui se passe à Ghardaïa où «les commanditaires des tragiques affrontements qu'a connus la région sont toujours libres». Néanmoins, le président du RCD donne une lecture des changements ayant touché le Département du renseignement et de la sécurité. Il a affirmé dans une déclaration liminaire, distribuée aux journalistes, que «les récentes mesures confirment l'incurie des tenants du pouvoir». «Au lieu d'un moment de débat transparent sur la redéfinition du rôle, des missions et du contrôle des Services de renseignement par la loi évaluées à l'aune des mutations et des nouvelles menaces mondiales, on a assisté et on continue d'assister à des règlements de comptes entre les responsables du malheur algérien», dit-il. Le départ du général Toufik du DRS ne veut aucunement dire, pour Mohcine Belabbas, la fin de la police politique. Selon lui, «la construction d'un Etat civil est antinomique avec l'entretien d'officines, le bâillonnement de l'opposition et la gestion patrimoniale du Trésor public». «La mission fondamentale et unique d'un Service de renseignement est de collecter et d'analyser l'information au profit des responsables politiques, ayant préalablement reçu un mandat populaire à travers des élections libres et transparentes, pour aider à la prise de décision», estime le président du RCD, qui souligne «n'attendre rien des dirigeants politiques qui gouvernent par la grâce de la police politique érigée en instrument privilégié de répression des libertés, d'organisation de fraudes électorales, de contrôle de la société et de violations des lois et règlements». Vont-ils aujourd'hui se convertir aux principes de respect des droits de l'homme et de la démocratie qu'ils ont niés, bafoués et trop souvent souillés ? L'invité du forum de Liberté n'y croit pas. Mohcine Belabbas ne trouve d'ailleurs pas crédibles les appels à la solidarité et à l'unité pour sortir le pays de la phase critique qu'il traverse, alors que ses dirigeants «cultivent les luttes de clans, favorisent la corruption, multiplient les obstacles administratifs, jettent l'anathème sur des investisseurs privés — allusion faite au patron de Cevital, Issad Rebrab — qui font travailler dans la légalité des milliers de citoyens, qui exportent et participent à l'ancrage de l'économie nationale dans les normes mondiales». Revenant sur la dernière marche organisée par son parti à Tizi Ouzou, Mohcine Belabbas a indiqué que c'est la huitième manifestation animée par le RCD durant l'année 2015. C'est, dit-il, pour «dénoncer l'annulation des projets structurants dans la région (entre autres le CHU prévu à Tizi Ouzou) mais aussi réitérer nos revendications comme l'officialisation de la langue amazighe». De plus, indique l'invité de Liberté, le RCD pense que «la construction du rapport de force nécessaire à l'avènement d'une transition passe par l'implication du citoyen». Visiblement, c'est sur cela que butent les membres de la Coordination pour les libertés et la transition démocratique (CLTD) en léthargie depuis plusieurs mois. Mohcine Belabbas l'affirme et soutient qu'«il est normal que la dynamique va connaître une décroissance après la phase de construction qu'a connue l'opposition». Ce n'est pas la seule raison. Le conférencier a fait aussi état de divergences au sein de la CLTD sur les moyens d'action. Pour le président du RCD, il n'y a pas mille chemins : «Il ne reste que l'action de rue pour imposer le changement.» Il ajoute ne pas être de ceux qui ont peur d'éventuelles manipulations et «ne craint pas une éventuelle explosion sociale qui peut imposer le changement dans le bon sens». Mohcine Belabbas indique que le pouvoir n'a pas la volonté de négocier avec une opposition qui travaille dans la légalité, et affirme être pour une Constitution de consensus, après l'organisation d'une élection présidentielle par une structure indépendante.