Le témoignage de l'ancien vice-président de Sonatrach sur la gestion de cette entreprise, publié par le journal El Watan, prend des allures de contre-procès face au déballage auquel a donné lieu le scandale de corruption mis au jour par les services de sécurité et impliquant de hauts cadres dirigeants de l'entreprise, dont le président-directeur général, M. Meziane. Dans ce brûlot, l'ancien responsable de Sonatrach interpelle nommément et publiquement les services du DRS – une première en l'espèce – en vue d'approfondir les investigations en s'intéressant aux grands contrats signés par Sonatrach où le préjudice financier causé se chiffre en milliards de dollars qui sont allés renflouer les comptes de personnalités influentes du pouvoir et de leur progéniture. En tant qu'enfant de la boîte qui a touché à la gestion de cette entreprise et qui connaît les mécanismes d'octroi des marchés ainsi que les ramifications qui irriguent la société et où se mêlent gestion officielle et interférences extérieures, Hocine Malti sait certainement de quoi il parle. Il ne se serait guère aventuré à mettre le doigt dans un tel engrenage s'il n'a pas assuré sa « défense », s'il n'a pas en sa possession, sinon des preuves de ce qu'il avance, du moins des pistes solides de nature à aider les enquêteurs à orienter leurs recherches, comme il les y invite, dans d'autres directions que les menus contrats de matériels de sécurité et de consulting qui constituent pour l'heure les seuls dossiers transmis à la justice. Cette sortie médiatique d'un ancien responsable de Sonatrach ne manquera pas de susciter courroux et embarras dans les milieux qui sont pointés du doigt par ces révélations. L'entrée en scène de cet invité surprise marque un tournant nouveau dans la conduite du procès. Il sera difficile à la justice de ne pas en prendre acte sous peine d'être accusée de vouloir cacher la vérité et de cautionner une machination qui consisterait à allumer des contre-feux au sein de cette entreprise en envoyant des cadres de direction et d'exécution en prison pour mieux protéger des personnalités en vue dans le sérail qui ont autrement plus profité des largesses de la poule aux œufs d'or. Bien évidemment, à la suite de ce témoignage accablant, il s'en trouvera toujours des voix pour crier à la manipulation, et voir dans ce déballage des velléités de règlement de comptes au sommet de l'Etat entre clans du système. M. Malti, qui a offert ouvertement ses services à la justice pour la manifestation de la vérité en rendant public son témoignage, sera-t-il convoqué par le juge d'instruction ? Dans un pays où la justice est réellement indépendante, le parquet n'aurait pas hésité un seul instant pour s'autosaisir. Mais même si la justice algérienne, par conviction ou pour d'autres considérations extra-judiciaires qui incitent à mettre les formes pour cultiver l'idée que l'Algérie est un Etat de droit, entreprend de convoquer l'ancien cadre de Sonatrach, que pèsera le témoignage d'un ancien cadre face à un dossier déjà ficelé. « J'ai des lignes rouges à ne pas franchir », cette confession du magistrat du tribunal de Blida qui a instruit l'affaire Khalifa gagnerait à être méditée.