L'exploitation de ces gisements s'accomplirait au détriment de l'intérêt de la population locale. Des stations d'enrobage activent sans autorisation et ajoutent également à la pollution. Rien ne va plus entre les gérants des carrières et la ville de Aïn Touta, qui abrite sur son sol des gisements de calcaire. Les nuages de poussière, dégagés par les carrières activant sur l'axe Batna-Aïn Touta, polluent l'air respiré par les 75 000 habitants de la commune et sont à l'origine de l'augmentation des maladies respiratoires, affirme Rabah Yahiaoui, P/APC et médecin de son état. Le problème exposé le 15 janvier dernier à l'occasion de la visite de Chekib Khelil, ministre de l'Industrie et des Mines, n'a pas eu d'écho favorable auprès des décideurs. La problématique est exposée selon un double aspect : économique et environnemental. Faute d'équilibre entre les deux, la collectivité risque d'être gravement lésée par les retombées néfastes des sites. Selon Mohamed Chaouch, directeur de l'industrie et des mines à Batna, ces carrières, au nombre de 13, profitent à Aïn Touta de par les recettes fiscales qu'elles procurent à la commune et leur contribution à absorber le chômage, à quoi il faut ajouter le fait que ces gisement pourvoient en matière première les grands chantiers de la wilaya, notamment la ville nouvelle de Hamla et le pôle universitaire de Fesdis. En outre, ces carrières ne seraient pas la source de la pollution, selon le directeur, qui pointe le doigt sur les stations d'enrobage, situées sur le même axe et qui activent, toujours selon lui, dans l'illégalité et sans respecter les normes imposées aussi bien par l'art minier que par les impératifs écologiques. A quoi le P/APC rétorque en soulignant d'abord que le nombre de carrières dépasse le chiffre 13, document à l'appui, et que la collectivité ne bénéficie d'aucune rentrée fiscale émanant de ces carrières, en ajoutant un chapelet de tracas engendrés par ces sites. En effet, et en plus des problèmes de santé dus à la qualité de l'air, on avance aussi le phénomène de disparition de la nappe phréatique qui jadis alimentait la ville et ses environs. Le dynamitage périodique utilisé dans les carrières aurait, en effet, provoqué des fissures dans le sol, et par conséquent la diminution du niveau de la nappe qui est passé de 10 m en moyenne à environ 200 m de profondeur. Ce qui fait désormais de Aïn Touta une ville où l'eau manque cruellement, provoquant des pénuries qui duraient jusqu'à deux mois, avant le soulagement apporté par l'eau du barrage. « La notion de pollueur-payeur n'existe pas chez nous hélas », regrette M. Yahiaoui, mais cela ne semble pas venir à bout de la témérité de son assemblée qui multiplie les démarches pour décrocher des dividendes, faute de mieux. La commune se veut, cependant, raisonnable et ne vise pas la fermeture de ces carrières, ce qui est difficile à envisager, mais du moins la limitation de leurs nombre. Or, l'APC a été surprise par le lancement récemment d'une autre carrière géante de l'autre côté de la ville, au mont Metlili (10 km sur la route de Biskra). Un projet ambitieux pour la wilaya, mais catastrophique pour Aïn Touta qui va regarder s'effriter le seul rempart naturel devant les vents du Sud, notamment le sirocco, chaud et étouffant. Les efforts déployés pour empêcher l'ouverture du site ont été vains et un cadre de la garde forestière aurait même perdu son poste pour s'être opposé au projet. Bref, la raison économique a primé et le respect de l'environnement s'est révélé, encore une fois, n'être qu'un discours creux destiné à la consommation, et l'Etat est le premier à violer les règles. Faut-il considérer la passivité de la direction locale de l'environnement comme élément de cette « anti-politique » ? Dans ce registre, on s'interroge aussi sur la passivité de la direction des domaines vis-à-vis des indus occupants qui exploitent les stations d'enrobage sans le moindre permis. La liste des irrégularités est encore longue et Aïn Touta est la seule victime qui s'en plaint !