Le traitement réservé à la grève des médecins apparaît comme le prolongement naturel de celui infligé aux enseignants l'année dernière. Il est une conséquence directe de l'absence ou de l'inefficience des mécanismes de dialogue et de concertation qui restent un indicateur des plus probants de l'état d'apaisement d'une nation. Notre gouvernement a raté une occasion de démentir la réputation que notre système politique est historiquement réceptif uniquement à ceux qui développent des capacités de nuisance. Ceux qui ont pris la décision politique de ne pas écouter les préoccupations du corps médical ni de le laisser porter sa voix par les médias publics lourds, de ne pas négocier ses revendications et de ne pas proposer un compromis aussi raisonnable pour les médecins que réalisable pour les pouvoirs publics sont en fait les héritiers directs de cette culture politique dominante chez nous qui veut que « moins tu étudies plus tu vaux ». Cela révèle également la triste et persistante réalité que notre pays n'a pas encore atteint le stade d'une valorisation adéquate de la science dont justement le corps médical est l'une des plus marquantes représentations. Ceux qui ont favorisé le pourrissement de la situation ne mesurent pas l'impact de leur attitude sur le recul des valeurs qui soutiennent tout progrès. En dépréciant tout rapport à la connaissance, ils donnent une image négative du savoir et de l'effort à nos enfants, participant ainsi à l'entreprise de démotivation d'une jeunesse déjà en mal de repères. Ceux qui cherchent à tirer profit du malaise social des médecins s'efforcent en même temps de réanimer une parodie de vie politique largement anesthésiée par la corruption et l'incompétence. Ce sont les mêmes forces anachroniques qui ont tout verrouillé pour réduire l'Algérie à leur propre insignifiante dimension, une proportion négligeable dans la nouvelle économie de la connaissance qui gouverne le monde.