Un couvre-feu de deux mois a été instauré par le gouvernement kenyan dans le comté de Mandera dans le nord-est. Le couvre-feu «est effectif du 27 octobre au 27 décembre, de 18h30 à 6h30», a indiqué le décret signé mercredi par le ministre de l'Intérieur, Joseph Nkaissery, et rendu public hier. Ce couvre-feu fait suite à une attaque meurtrière perpétrée par le groupe armé somalien shebab, selon des sources officielles. En effet, au moins 12 personnes – 11 hommes et une femme – ont été tuées dans la nuit du lundi 25 au mardi 26 octobre dans une attaque à l'explosif menée par des islamistes somaliens shebab visant une maison d'hôtes dans la ville de Mandera, dans l'extrême nord-est du Kenya. La bombe artisanale a explosé vers 3h30 (2h30, heure française), faisant s'effondrer une partie du bâtiment. «Des officiers de sécurité en patrouille, qui ont accouru immédiatement, ont circonscrit la zone et commencé les opérations de secours. Tous les occupants de l'hôtel ont été évacués et six ont été sortis vivants des décombres pour le moment», a précisé un responsable local. Lors d'une conférence de presse, le gouverneur du comté de Mandera, entouré de plusieurs homologues des comtés voisins, a «condamné cet acte odieux». Insécurité Les corps des victimes de l'attaque ont été rapatriés mardi soir à Nairobi, la capitale kényane. Selon plusieurs médias kényans, certaines des victimes de Mandera appartenaient à une troupe de théâtre qui devait se produire dans plusieurs écoles de la ville. Au moins six d'entre elles ont pu être sorties vivantes des décombres. A cet effet, Ali Roba, gouverneur du comté de Mandera avait qualifié cet acte d'«odieux, perpétré par les lâches shebab». Ce dernier a d'ailleurs insisté sur «la stratégie des shebab dans cette partie du Kenya», qui vise, selon lui, à «l'isolement économique de la région, à imposer des sanctions économiques sur la population de cette région et à tenter de la couper du reste du pays». «De nombreux programmes destinés à bénéficier à la population de Mandera ont dû être abandonnés en raison de l'insécurité», a-t-il ajouté, y compris ceux d'organisations non gouvernementales. Le nord-est du Kenya, qui partage une longue frontière avec la Somalie, est le théâtre depuis environ trois mois d'une recrudescence d'attaques attribuées aux shebab. Mandera a ainsi été frappée pour la deuxième fois en moins d'un mois. En effet, le 22 septembre, un poste de police dans la localité de Liboï avait été attaqué par plusieurs dizaines de combattants, finalement repoussés par les forces de sécurité kényanes. Élection En juillet, le poste de Diff, dans le comté de Wajir, lui aussi frontalier de la Somalie, avait à son tour été visé. Mandera a aussi été ciblé, le 6 octobre, par un attentat commis par les shebab causant la mort de six personnes qui se trouvaient dans un complexe résidentiel abritant des employés du secteur du bâtiment. Deux postes de police ont également été attaqués dans la région, le 22 septembre à Liboï et en juillet à Diff, dans le comté voisin de Wajir. Depuis son intervention militaire dans le sud de la Somalie en 2011 pour lutter contre les shebab, le Kenya a été la cible de plusieurs attentats meurtriers, notamment ceux du centre commercial Westgate à Nairobi (septembre 2013 – 67 mort) et de l'université de Garissa, dans l'Est (avril 2015 – 148 victimes). Outre la menace shebab, les élections générales prévues en août 2017 sont susceptibles d'alimenter les tensions au Kenya, y compris dans le Nord-Est. Des tensions vives qui se font ressentir dans le comté de Mandera en vue de l'élection du futur gouverneur, selon plusieurs sources sécuritaires. «Certains hommes politiques pourraient vouloir rendre la situation difficile pour d'autres, de sorte que l'état d'urgence soit déclaré dans le comté et que les élections ne se déroulent pas en 2017 dans cette région», a estimé un haut responsable sécuritaire sous couvert de l'anonymat. «Les premiers éléments de l'enquête conduisent à penser à l'implication de criminels locaux dans l'attaque de mardi». «Notre frontière avec la Somalie est fermée la nuit et il est impossible que des assaillants traversent cette frontière sans être repérés», a relevé l'administrateur Mohamoud Saleh.