Alors que le discours officiel va dans le sens de la simplification des procédures d'importation en faveur des entreprises de production, c'est un décret exécutif d'une autre teneur que s'apprête à promulguer le Premier ministre. Le projet de texte intitulé « Décret exécutif fixant les modalités de suivi des importations en franchise des droits de douane dans le cadre des accords de libre-échange » vise au contraire à compliquer les formalités administratives aux importateurs, sans aucune distinction de statut. L'article 2 de ce projet de décret met en effet dans le même sac les importateurs exerçant des activités de production que ceux activant dans le commerce (revente en l'état). Dès promulgation du décret, tous ces opérateurs, sans exception, devront, avant toute opération d'importation, formuler une demande de franchise des droits de douane adressée à la Chambre de commerce et d'industrie territorialement compétente, comportant des renseignements et de nombreux documents, dont la facture proforma en trois exemplaires, des copies légalisées du registre du commerce, de l'identifiant fiscal, des statuts de la société... Il leur sera également exigé la présentation d'une copie légalisée de l'attestation de dépôt des comptes auprès du Centre national du registre du commerce et un extrait de rôle apuré. Le visa d'importation, valable pour une durée de 6 mois, est délivré dans un délai ne devant pas excéder 6 mois par les directions régionales de commerce concernées. L'article 3 du projet de décret précise bien que « la demande de franchise des droits de douane constitue une licence statistique aux fins de suivi des importations », preuve, s'il en fallait une, que ce texte marquera un retour sournois à la sinistre période des autorisations globales d'importations (AGI). Ce qui a fait dire à un grand avocat d'affaires interrogé sur la question que « certains cercles de décision se sont, ces derniers temps, arrogé le droit de naviguer à contre-courant de l'évolution de l'économie mondiale aux dépens de nos engagements internationaux. Plus grave encore, aux dépens des intérêts du pays et, notamment, son économie qui a sombré depuis quelques mois dans une véritable léthargie ». Interrogé sur la portée et les possibles retombées de ce texte sur les entreprises de production, Larbi Ouahmed, le patron de l'entreprise industrielle Dékorex-Novoplast, considère que s'il venait à être promulgué, ce décret exécutif, rédigé sans consultation aucune des opérateurs concernés, ne fera qu'exacerber les difficultés auxquelles sont déjà fortement confrontés les producteurs. Il recommande que soient d'abord clarifiés, en les listant avec suffisamment de précision, les produits importés entrant dans les cycles de production industrielle pour les distinguer de ceux destinés à la revente en l'état car, précise-t-il, l'article 2 du projet de décret est très vague en la matière. La distinction, ajoute-t-il, devrait s'établir à l'avantage des industriels et autres producteurs qui devraient en bénéficier davantage en matière de fiscalité douanière et de célérité en matière de procédures de dédouanement. Il recommande enfin que les entreprises de production préalablement identifiées bénéficient d'une carte d'opérateur leur ouvrant automatiquement droit à ces avantages.