Sous l'ère coloniale, les Algériennes avaient lié leur propre émancipation à celle de leur peuple. Avec l'accession de l'Algérie à la souveraineté nationale, elles ont, en toute légitimité, espéré qu'elles allaient enfin jouir de la citoyenneté pleine et entière, de l'égalité des droits dans la sphère publique et privée. Las ! Quelle désillusion ! Elles ont très vite été invitées à réintégrer leur foyer, à se contenter de leur rôle d'épouse et de mère exemplaires devant élever leurs enfants dans le respect des traditions. Ces « gardiennes des valeurs et de la tradition » subissent, depuis, l'ordre réactionnaire, qu'il soit institutionnel ou sociétal, et les archaïsmes de toute origine, qui les écrasent. Certes, l'égalité des droits à l'instruction, au travail, à la vie civique est posée par la Loi fondamentale, la Constitution. Il reste qu'une loi, toute nécessaire qu'elle soit, ne vaut que par son effectivité, sa traduction dans les faits et pratiques de la vie courante. Quel que soit son niveau d'instruction, de formation, de qualification, de responsabilité, l'Algérienne reste, du fait du code de la famille, mineure et inférieure à l'homme. Les quelques femmes qui occupent de hautes fonctions de l'Etat, qui sont magistrates, députées n'en sont pas exemptes. Pour se marier, elles ont besoin d'un tuteur. Quel paradoxe de la société algérienne ! Que dire des comportements obscurantistes, rétrogrades et machistes qui vont en s'aggravant. Qui intervient quand une femme se fait violenter dans la rue ou jusque dans l'intimité de son foyer ? Les agressions contre les femmes ne sont pas des actes isolés. Le législateur, le magistrat, l'élu politique, le gouvernant doivent-ils se satisfaire de cette situation ? Le père de famille, le frère, le mari, le voisin doivent-ils rester passifs ? Il n'y a pas de fatalité. Pour ne pas être qualifiée de prostituée, la femme doit-elle obligatoirement vivre à l'ombre d'un homme : mari, père, frère ? Quelle protection pour celle qui veut tout simplement vivre sans tutelle ? En toute autonomie ? La femme algérienne n'est pas une icône. Ce n'est pas a contrario un objet ni un défouloir. La reconnaissance de ses droits, le respect de sa personnalité morale, de son intégrité physique sont un défi et un combat permanents. Aussi, une action et une réaction énergiques contre les mentalités rétrogrades, les préjugés, les archaïsmes, les fetwas qui vouent la femme aux gémonies sont nécessaires, voire impératives. Une loi égalitaire en lieu et place du code de la famille foncièrement discriminatoire est tout aussi attendue. Ce ne sera que justice.