Bombino, le talentueux chanteur et instrumentiste nigérien et des musiciens de la formation Imzad avaient accompagné Ibrahim Abraybone, pour une seule chanson, plutôt un «bœuf», le 31 décembre 2018 à l'occasion de la clôture des journées culturelles du Sud. Devant un public de plus de 20 000 personnes. Et ce, en guise d'hommage à Ibrahim Abraybone, un pair et un père spirituel de la musique targuie. Une initiative de l'association Sauver l'imzad et dont l'idée avait germé parmi les jeunes de la scène locale faisant dans le blues targui et ayant applaudi pour célébrer leur idole, leur leader. Aussi, Ibrahim Abraybone a été le récipiendaire d'un trophée honorifique saluant celui qui a porté la voix des Touareg à l'international, qui a grandi en Algérie et soulignant sa précieuse contribution musicale de haut vol à travers le monde. Il recevra un trophée honorifique à titre d'ambassadeur de la musique touareg dans le monde des mains de Mme Farida Sellal, présidente de l'association Sauver l'Imzad. Bombino, joint par téléphone depuis Niamey (Niger), reviendra sur cette soirée de cet «acte manqué», le concert de Tinariwen n'a pu se tenir, à propos vraisemblablement d'un problème de visa. Il remplacera Tinariwen au pied levé, vu cet impondérable. «Tout était en règle. Il n'y avait pas de soucis. Une organisation parfaite de l'ONCI. Tout était respecté. Les différents itinéraires et visas des artistes de Bamako et Niamey. On a reçu les invitations, le plan de voyage, les billets d'avion de l'ONCI, chacun selon sa région. Sauf pour ceux qui avaient un problème administratif. On ne peut entrer d'une manière illégale dans un pays, en Algérie. Je crois que c'est un ‘‘montage'' (cela n'a pas lieu d'être)», indiquera Bombino. Mahmoud Neslem, musicien au sein du groupe Imzad ayant joué cette soirée-là aux côtés du leader de Tinariwen précisera : «Nous n'avons pas organisé la tournée de Tinariwen. Mais nous les musiciens, les membres de l'association Sauver l'Imzad, avons pensé à honorer Ibrahim Abraybone. Au début c'était difficile. Parce qu'il n'est pas dans le réseau. Il vit dans le Sahara, sans portable, déconnecté, mais lors de la fête du dromadaire de Timiaouine (Bordj Badji Mokhtar), où le groupe Imzad s'était produit avec lui trois soirées de suite, Moussa (musicien du groupe Imzad), l'a rencontré et lui a fait part de notre proposition et celle de l'association Sauver l'Imzad initiant un hommage à son endroit. Il était ravi et a dit qu'il n'y avait aucun problème. Alors, on l'a invité, ici, à Tamanrasset. Il a effectué une visite de courtoisie à Dar El Imzad (structure et siège de l'association Sauver l'Imzad). Il était enthousiasmé de se produire devant le public de Tamanrasset sans protocole ni rien du tout. Ibrahim Abraybone est très simple. Cette soirée-là (le 31 décembre 2018), il a fait les balances et m'a envoyé sa guitare à cet effet. Ibrahim Abraybone montant sur scène pour son hommage, il était aux anges, très heureux de se retrouver parmi les siens. Mais quand le reste du groupe Tinariwen et leur manager sont entrés dans les coulisses. Je ne sais pas ce qui s'est passé. J'ignore la teneur de la discussion qui a tourné entre eux. Mais il avait aussitôt l'air contrarié. Peut-être qu'il s'agissait du contrat… Certains des musiciens avaient un problème (visas) qui ne relève pas de notre ressort. J'ai vu des larmes couler sur les joues. La vidéo est là, elle existe. L'hommage s'est très bien passé. Et le public a au moins vu chanter son idole, Ibrahim Abraybone, accompagné par le groupe Imzad et le grand Bombino. «Vous savez, plusieurs membres de Tinariwen vivent et habitent ici, à Tamanrasset. Ils sont là, parmi nous. Ibrahim Abraybone a ses filles qui sont mariées, ici». Badi Lalla, la légende vivante de la musique targuie, la diva du tindi, nous témoignera toute l'affection qu'elle porte à Ibrahim Abraybone : «Cela fait longtemps que nous, chanteurs, musiciens et membres de l'association Imzad, voulions rendre hommage à Ibrahim Abraybone.» J'ai même joué avec lui à l'occasion de la fête du dromadaire de Timiaouine (Bord Badji Mokhtar). «Il m'avait assuré qu'il aller venir jouer avec nous. Lors de l'hommage, à Tamanrasset, il était passé après moi. Il a reçu un hommage à la hauteur de sa dimension d'artiste avec un immense respect. Vous savez, j'ai eu l'honneur de partager la scène avec Ibrahim, en France, en 2015…» Pour rappel, le groupe Tinariwen, le 8 janvier 2018, avait posté un communiqué : «Nous tenons à rectifier le communiqué diffusé par l'ONCI le 2 janvier 2019 sur sa page facebook. Tinariwen ne peut en effet effectuer la tournée prévue en Algérie à Tamanrasset, Constantine, Alger et Oran. Non pas pour «des raisons techniques propres au groupe», comme annoncé par l'ONCI (organisme d'état algérien organisateur de cette tournée) mais pour un manquement d'ordre administratif de leur part. En effet, l'ONCI n'a pas effectué les démarches nécessaires afin de permettre au groupe de jouer sur le territoire algérien… Et à l'ONCI de préciser : «L'Office national de la culture et de l'information, sans vouloir entrer dans une polémique, étonné de cette réaction, tient à souligner que le groupe Tinariwen, invité pour, d'une part, participer à la cérémonie hommage à leur leader Ibrahim Ag El Habib pour son action en faveur de la promotion de la musique targuie dans le monde et d'autre part pour une tournée, a été reçu avec tous les égards dus à leur rangs et leur renommée tant à Alger qu'à Tamanrasset. La soirée de clôture des journées culturelles du Sud organisées à Dar Imzad, placé sous le signe d'un vibrant hommage à Ibrahim Ag Alhabib dit Abraybone s'est déroulée dans une ambiance digne du leader du groupe qui s'est produit sur scène avant de recevoir sa distinction plébiscité par le public…»