Alors que le procès sur le trafic de thon rouge doit être jugé jeudi à Annaba, les armateurs algériens s'inquiètent pour la prochaine campagne de pêche. Car ils n'ont toujours pas reçu leur quota. Impliqué dans le scandale avec les Turcs, le ministère ne bronche pas... « Nous arrivons à la fin du mois et le ministère devrait déjà nous attribuer le quota de thon que nous sommes autorisés à pêcher lors de la prochaine campagne, du 15 mai au 15 juin. Mais nous n'avons toujours rien reçu », relève Rachid Bousdira, armateur. Et il n'est pas le seul à s'en inquiéter. « J'ai déjà envoyé deux courriers restés sans réponse, déclare de son côté un autre armateur. Avec les prêts à rembourser à la banque et l'équipage à payer, il ne faudrait pas que la pêche nous soit interdite parce que l'Algérie n'a pas respecté les délais qu'impose la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (ICCAT). » D'autant plus que cette année, d'après la décision prise dimanche dernier, par le ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques, les exploitants étrangers ne sont plus autorisés à pêcher le thon rouge dans les eaux algériennes, désormais réservées aux opérateurs nationaux. Une décision qui laisse certains professionnels sceptiques. « Ce n'est certainement pas pour que les Algériens puissent profiter de leurs ressources, poursuit Rachid Bousdira. L'an dernier, la direction de la pêche nous avait imposé tellement de contraintes que nous n'avons rien pris. Il avait, par exemple, été décidé de supprimer les quotas individuels. Autrement dit les premiers arrivés avec les 1200 tonnes de quota national autorisé par l'ICCAT clôturaient la pêche. Par ailleurs, nous n'avions pas le droit de sortir des eaux algériennes. Or, le thon est un poisson migrateur qui passe dans les eaux internationales. Ensuite, le produit de notre pêche devait absolument être ramené à Alger. Imaginez un navire du côté d'Annaba qui transporte une cage de thon ! Il ne peut pas aller au-delà de 4 km/h. Vous voyez un peu le temps qu'il lui faut pour arriver à Alger ? On a vraiment tout fait pour nous pénaliser. » A Marseille, Mourad Kahoul, président de l'Association euroméditerranéenne des pêcheurs professionnels de thon, aujourd'hui à Doha pour la conférence de la CITES (voir encadré) ne comprend pas une telle décision. « La pêche est un grenier de l'économie algérienne ! Cette mesure n'est pas du tout cohérente ! Au lieu de fermer la porte aux étrangers qui ont de l'expérience, il faudrait organiser une table ronde car ce qui se passe est très dangereux pour la filière. Et pour l'instant, l'Algérie n'est pas bien représentée au niveau international. » Nous avons tenté de contacter à plusieurs reprises le ministère de la Pêche en nous adressant à plusieurs services. A quelques jours du jugement sur l'affaire du trafic de thon rouge à Annaba, dans laquelle sont impliqués Fateh Boudamous, secrétaire général du ministère de la Pêche, et Kamel Allam, directeur des pêches maritimes et océaniques, personne n'a souhaité répondre à nos questions.