Plus de 50 après, les archives de la période coloniale, constituant un pan important de la mémoire de la nation, sont toujours conservées dans les centres d'archivage de l'Hexagone. L'Algérie n'a récupéré, selon le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, qu'une partie infime de ses archives. En somme 2% seulement des archives avaient été restitués à l'Algérie sous forme de geste de bonne volonté des autorités françaises de bâtir des relations politiques extirpées de la tension qui les a toujours marquées. Aujourd'hui, cette question revient au-devant de la scène à l'occasion de la visite qu'effectue le président français, Emmanuel Macron, en Algérie. Ce dossier en suspens sera-t-il au menu de cette visite de travail ? Le gouvernement, par la voix de son ministre des Moudjahidine, affirme attendre beaucoup de ce déplacement, notamment en ce qui concerne le dossier de la mémoire, entre autres les archives. Seulement, les historiens et les observateurs de la scène politique ne se font pas trop d'illusions, ils doutent fort que cette question soit évoquée par les deux parties. L'historien Mohamed Corso pense qu'il n'y a pas une volonté politique nécessaire de la part des autorités algériennes pour la récupération des archives spoliées par la France. Mieux, il explique que l'Algérie, au lieu d'être ferme et rigoureuse sur cette question, a fait, contre tout attente, des concessions. «C'est vrai que la question des archives revient à chaque occasion, les pouvoirs publics en parlent, mais ne se font pas entendre. Parler, c'est une chose et agir et faire du tapage c'est une autre action», affirme M. Corso qui trouve déplorable le fait que l'Algérie a ouvert ses portes à l'investissement français en faisant fi de l'histoire et de la mémoire meurtrie et bafouée. Cet historien a rappelé que le problème des archives a été posé avec insistance à la fin des années 1970 et début 1980, période correspondant aux élections présidentielles en France, mais les candidats en lice ont utilisé le dossier des archives comme carte électorale. «Il n'était pas question pour les candidats de l'époque, à savoir Valéry Giscard d'Estaing et François Mitterrand, qu'une seule archive soit transférée en Algérie, car, pour eux, les voix des pieds-noirs étaient plus importantes», note M. Corso, qui déplore l'exclusion des archivistes aussi bien du débat que de la gestion des archives. Par ailleurs, et de l'avis du directeur général des Archives nationales, Abdelmadjid Chikhi, la récupération des archives «ne se limite pas aux seuls documents de l'administration, mais concerne aussi les manuscrits, les documents scientifiques et les pièces archéologiques qui ont été transférés en France». Ces documents sont la preuve, selon lui, que le peuple algérien n'était pas ignorant et qu'il comptait de nombreux savants qui le caractérisaient des autres nations. Comme il y a la valeur inestimable des pièces archéologiques qui font partie de ce capital archivistique. Un véritable trésor, comme celui qui a été dérobé de La Casbah d'Alger dès la prise d'Alger en 1830.