Le papier sera bleu, film roumain de Radu Muntean, revient sur les troubles de décembre 1989, qui avaient mis fin à 24 ans de dictature. C'est un voyage au bout de la nuit. Pas à la manière de Céline, mais à celle de Radu Muntean. Ce cinéaste roumain, qui avait 18 ans en 1989, année de l'effondrement du régime de Nicolae Ceausescu, est revenu dans Le papier sera bleu, long métrage sorti en 2006 et projeté dimanche soir à la salle Cosmos à Riadh El Feth à Alger à la faveur des Journées du film francophone, sur cette période trouble. En fait, tout se passe en une nuit, celle du 22 décembre 1989 à Bucarest, capitale de la Roumanie. Les manifestants aux drapeaux troués réclament bruyamment la fin du régime communiste et investissent la rue par petits groupes. Costi Andrenoescu, interprété par Paul Ipate, est un jeune soldat. Il est stationné avec un groupe de militaires à bord d'un véhicule blindé portant le matricule 1834. Costi ne cache pas ses sympathies pour les manifestants. Et il est, contre l'avis de son chef, pris par la tentation de vouloir « défendre » le siège de la télévision. Dans les régimes fermés, le contrôle de la télévision, souvent réduite à une simple machine à propagande, est vital. Dans le film, la télévision est partout. L'histoire a retenu que Ceausescu avait été hué par les manifestants en direct à la télévision, le 21 décembre 1989. Les protestataires dénonçaient la boucherie de Timisoara, ville où l'armée avait ouvert le feu sur la foule en colère. Le discours du maître de Bucarest avait été rompu et le siège de la télévision avait été envahi des heures après. C'était le début de la fin d'un règne qui a duré 24 ans. Ceausescu et son épouse, Elena, ont été exécutés dans des conditions troubles dans la nuit de Noël. Costi est pris par « un terroriste » et a failli être tué avec un tsigane, pris pour un « Arabe » ! Les camarades du soldat se mettent à le chercher en choisissant les itinéraires dans une ville en ébullition. La confusion gagne également les transmissions militaires et les mots de passe au gré des humeurs, « Le papier sera bleu » en est un. Pourtant, ce mot de passe sera fatal. Costi est récupéré par ses camarades et écoute la lambada, le tube du groupa Kaoma et de la Brésilienne, Loalwa Braz. La Roumanie sera, l'espace d'un temps, devenu folle, prise entre une armée sans chef, un peuple en révolte et un président fuyard. Réality show Tout était permis ! Radu Muntean a restitué l'ambiance de l'époque en y mettant de l'absurde, marque de fabrique d'un cinéma est-européen encore méconnu en Algérie. « Toutes les images montrées dans ce film me rappellent ce que j'ai vécu personnellement, par les parents ou par les amis en Roumanie. C'est un film émouvant qui ressemble à un reality show », a expliqué Victor Mircea, ambassadeur de Roumanie à Alger. Ce cinéaste, très attaché aux techniques du théâtre et de la publicité, s'est déjà distingué par La Rage et par Boogie, deux œuvres poétiques qui soulignent une certaine vivacité du nouveau cinéma roumain. Autre terre, autre histoire. Sur la côte océane du Sénégal, un village est plongé dans le brouillard depuis longtemps. Les pêcheurs ne peuvent plus affronter les flots. Un mauvais sort ? Mbanik, fils du sage, va sauver la situation en construisant une pirogue à partir d'un arbre aux fleurs jaunies. Fou de jalousie par l'amour de Maxoye envers Mbanik, Yatma va se venger, mais il va lourdement payer son geste. Le film du sénégalais Mansour Sora Wade, sorti en 2001, projeté également dimanche soir, est un véritable conte africain, passionnant et profond. Dommage que les films sénégalais sont peu présents dans les salles algériennes.