Deux événements récents relatifs à la pêche au thon rouge mettent les autorités algériennes dans l'embarras. La CoP15 de la CITES qui se tient à Doha (Qatar) a rejeté la proposition de Monaco, appuyée par les USA et l'Europe, d'inscrire le thon rouge en annexe I, donc de suspendre sa pêche. Et, plus près de nous, l'annonce faite par le ministère de la Pêche et des Ressources halieutiques (MPRH) de ne plus faire appel à des thoniers étrangers pour les prochaines campagnes. A Doha, le lobbying nippon l'a emporté. La pêche au thon ne sera pas interdite en Méditerranée au grand dam des écologistes, mais aussi à celui du MPRH pour lequel, et en dépit des apparences, l'interdiction de cette pêche était une inespérée bouée de sauvetage. En effet, pour 2010, un quota de 680 tonnes a été alloué à l'Algérie et il faudra bien le pêcher. Mais pour l'heure, cela paraît impossible car l'Algérie doit le faire avec ses thoniers, sans le concours des étrangers, comme décidé par l'ICCAT pour tous les pays et pas seulement en Algérie, comme on a tenté de le faire croire en mettant cette décision sur le compte de la sauvegarde de la souveraineté nationale. Etre ainsi obligé de lancer la campagne et de le faire par ses propres moyens va mettre à nu une réalité qu'on a cachée au peuple. Celle que l'Algérie n'a jamais disposé d'une flottille de thoniers pour pêcher les quotas qui lui sont alloués depuis 1996 et qui ont atteint 2900 tonnes/an et que, par conséquent, on est en droit de se demander où est passé l'ensemble de ses captures estimées à 2 milliards d'euros. Une question restée à ce jour sans réponse, malgré notre insistance auprès de MPRH. Récemment encore le SG de ce ministère nous promettait, avant son implication dans l'affaire de Annaba, de nous livrer toutes les informations sur ce sujet. Le trafic, que nous dénoncions dans ces colonnes depuis plusieurs années et aujourd'hui reconnu, a été mis au jour avec l'affaire de Annaba. Avant chaque campagne, le MPRH adresse à l'ICCAT la liste des bateaux engagés et la répartition du quota. Parfois à l'insu même de leur propriétaire. Des embarcations qui ne sont pas des thoniers au sens propre du terme, mais des chalutiers sans l'armement adéquat et d'un gabarit approximatif pour faire bonne figure à la surface de l'eau. La pêche qu'ils sont censés avoir effectuée a déjà été faite à des milliers de kilomètres par d'autres unités qui ne sont pas autorisées par leurs Etats. Des pilleurs. Près de nos côtes, on simule un échange. Au lieu de livrer une capture à un client venu les récupérer, les Algériens remettent, après un simulacre de transfert de la marchandise, un document attestant qu'il s'agit d'un quota national qui n'est pas prélevé illicitement. Pour les professionnels qui s'interrogent sur les retards dans la préparation de la campagne 2010, notamment la diffusion du quota national et l'appel à faire des offres, le MPRH tente de provoquer « une pêche blanche » pour masquer l'absence de cette flottille qui ne compte aujourd'hui qu'une demi-douzaine d'unités dignes de ce nom et d'acquisition récente. Ils fulminent contre le fait que le MPRH n'a pas diffusé, à temps, la circulaire ICCAT 513/10 qui place des observateurs de cette organisation sur chaque navire engagé contre l'acquittement de frais d'un montant de 21 000 euros qui devaient être versés avant le 19 mars 2010 à la banque de l'ICCAT à Madrid (voir encadré). Ces observateurs indépendants ne peuvent en effet pas être abusés.