A près des années de léthargie dues à plusieurs facteurs, le secteur du chemin de fer dans la région de Constantine semble reprendre du souffle à la faveur de la mise en place d'une nouvelle stratégie de planification, avec l'acquisition de nouveaux équipements pour le transport de marchandises et la mise en service des autorails. Une nouvelle ère s'annonce pour la reconquête d'un marché de plus en plus important où la concurrence est désormais très rude, notamment avec l'avènement de l'autoroute Est-Ouest. A la direction régionale ferroviaire de Constantine (DRFC) sise dans le secteur de Bab El Kantara, l'on annonce la mise au point depuis deux ans d'un plan de relance pour redorer le blason d'une activité longtemps marginalisée au profit du transport autoroutier, après avoir subi d'énormes pertes lors de la décennie du terrorisme. « Avec les moyens dont nous disposons actuellement, nous serons capables de répondre à tous les besoins de notre clientèle, avec même des prévisions à la hausse pour les prochaines années », a souligné un responsable à la DRFC. Pour preuve, cette dernière couvre déjà un territoire stratégique avec pas moins de dix wilayas, Constantine, Sétif, Skikda, Jijel, Oum El Bouaghi, Mila, Batna, Biskra, El Oued et Ouargla. Le réseau d'une longueur de 1395 km en voie unique (sans compter les voies réservées pour le service et les voies doubles), est l'un des plus denses au niveau national, affirme-t-on à la DRFC. Des voies dont les frontières s'étendent jusqu'à Tébessa à l'est, Ramdane Djamel, dans la wilaya de Skikda au nord, El Annasser à Bordj Bou Arréridj du côté ouest et Touggourt, dans la wilaya de Ouargla au sud. « La région compte 53 gares opérationnelles, dont certaines remontent à l'époque coloniale comme celles de Constantine, Sétif et Skikda, alors que d'autres ont une importance reconnue sur le plan économique à l'instar de celles de Batna, El Eulma, Biskra, Touggourt et Bazoul, dans la wilaya de Jijel », notera un cadre de la DRFC. Défi à relever L'importance économique que revêt la région de Constantine découle surtout de sa position stratégique comme plaque tournante entre les ports de la côte est du pays et les zones ouest et sud. Une importance qui s'est développée avec l'ouverture du port de Djendjen dans la wilaya de Jijel, devenu un pôle pour les activités d'importation et d'exportation de produits agricoles. « La vocation de la région, située entre le pôle hydrocarbures de Skikda et le port de Djendjen, et la présence de plusieurs cimenteries, ont favorisé la tendance vers le transport du carburant, du ciment et des céréales », indique-t-on à la DRFC. A ce sujet, l'on saura que pour l'année 2009, le transport de marchandises a enregistré 1 642 944 tonnes de ciment, sur un prévisionnel de 1 970 000 tonnes, soit un taux de réalisation appréciable de 83,40%. En deuxième position, le transport du carburant a recensé en 2009 le chiffre de 1 097 887 tonnes réalisés, sur un prévisionnel de 1 160 000 tonnes, soit un taux de 94,65%, alors que l'on a affiché durant la même année 371 433 tonnes de céréales sur 597 000 tonnes prévus, soit un taux de 62,22%. « Nous avons un énorme défi à relever pour les années à venir, surtout avec la concurrence rude qui s'annonce avec l'ouverture prochaine de l'autoroute Est-Ouest, sachant que nombreux parmi nos anciens clients ont préféré acquérir des camions gros tonnage, mais ceci ne nous empêchera pas d'axer nos efforts sur l'information et la sensibilisation quant à l'aspect économique et peu coûteux de nos prestations », a noté un responsable de la DRFC qui ne manquera pas de préciser que les actions futures de l'entreprise seront revues à la hausse avec l'acquisition depuis deux ans de nouvelles locomotives de gros tonnage, en sus de la modernisation opérée sur le rail. L'on prévoit déjà pour l'année 2010, le transport de 1382 400 tonnes de carburant et 420 000 tonnes de céréales. Malgré son importance, le transport de voyageurs, qui faisait jadis le plein dans la région durant les saisons estivales des années 1990 et jusqu'au début des années 2000, semble en perte de vitesse. Selon la plupart des anciens et fidèles clients de l'entreprise, les nouveaux tarifs pratiquées depuis quelques années ont découragé plus d'un. Le lancement en juillet 2008 du premier autorail reliant Constantine à Annaba inauguré en grande pompe par le ministre des Transports, Amar Tou, n'a pas suscité l'engouement des citoyens, notamment ceux désireux de rejoindre les plages de la Coquette. Cette même ligne sera abandonnée quelques mois plus tard pour des raisons qui demeurent encore inconnues. « La DRFC, qui a réceptionné sept autorails, dont trois ont été gardés en réserve, a finalement ouvert quatre dessertes, actuellement en service », a-t-on appris auprès d'un responsable à la direction régionale. Si les lignes Constantine-Jijel, Constantine-Skikda et Constantine-Tébessa étaient quelque peu attendues, vu l'importance du trafic entre ces wilayas, la desserte de M'sila a été la surprise de ce programme, même pour les conducteurs de train. Résultat : des trains roulant à perte. Chaque jour, les trains roulent presque vides, malgré le confort et la climatisation. Pour le moment les quatre lignes ne sont pas rentables à cause des horaires inadaptés mais surtout en raison des prix jugés excessifs par les clients. Le passager doit débourser, par exemple, 560 DA pour aller à Jijel, contre 250 DA par taxi et la moitié dans un bus. Le billet Constantine-Skikda coûte 240 DA, alors qu'une place dans un taxi ne vaut que 150 DA et 80 DA dans le bus. Ce constat s'applique aussi pour la ligne Constantine-Tébessa où le ticket coûte 720 DA, alors que pour aller à M'sila, il faudra payer… 800 DA. « Ce n'est pas du jour au lendemain que l'on pourra instaurer une culture ferroviaire chez le citoyen, même si l'on reconnaît que les tarifs sont assez élevés par rapport au pouvoir d'achat, mais on songe à trouver des solutions à ce problème », a affirmé un cadre de la DRFC.