Abu Dhabi a accusé hier Doha d'avoir «intercepté» un avion de ligne émirati en route vers Bahreïn. «Cet incident aérien est une menace flagrante pour la sécurité de l'aviation civile et une claire violation de la loi internationale. Il s'agissait d'un vol régulier qui disposait de tous les documents requis», a affirmé l'Autorité générale de l'aviation civile émiratie dans une déclaration relayée par l'agence officielle, WAM. Doha, qui n'entretient plus de relations diplomatiques avec Abu Dhabi depuis le mois de juin dernier, n'a pas mis longtemps pour démentir les accusations émiraties. «L'Etat du Qatar déclare que les affirmations selon lesquelles des avions de chasse qataris ont intercepté un avion civil des Emirats (sont) totalement fausses», a dit Lulwa Al Khater, porte-parole du ministère qatari des Affaires étrangères, sur son compte Twitter. Les Emirats sont-ils en train de chercher simplement un prétexte pour attaquer militairement le Qatar ou renverser Tamim Ben Hamad Al Thani ? La question se pose, d'autant que Doha s'est plaint à deux reprises ces derniers jours du fait que des avions militaires émiratis avaient violé son espace aérien, une première fois le 21 décembre, une deuxième fois le 3 janvier. Cette violation a d'ailleurs entraîné des plaintes auprès des Nations unies. Cet échange d'accusations intervient dans un contexte déjà très tendu. Dimanche, la chaîne de télévision Al Jazeera basée au Qatar a diffusé une vidéo montrant un membre de la famille royale qatarie affirmant être retenu contre son gré aux Emirats. Abu Dhabi a démenti, affirmant que cette personnalité, cheikh Abdallah Ben Ali Al Thani, était libre de ses mouvements et qu'elle pouvait quitter les Emirats quand bon lui semblait. Mais les Qataris maintiennent leur version. Dans son bras de fer avec les Emirats et les autres monarchies du Golfe, le Qatar compte notamment sur le soutien de la Turquie. L'émir du Qatar, cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, était d'ailleurs hier à Ankara, où il a été reçu par le président Recep Tayyip Erdogan. Les deux dirigeants se sont retrouvés au palais présidentiel dans l'après-midi, selon la présidence turque, qui n'a pas dévoilé la teneur de leurs échanges. M.Erdogan, qui se pose comme le principal protecteur de cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, a récemment établi une base militaire au Qatar qui peut contenir jusqu'à 3000 hommes. L'Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, Bahreïn et l'Egypte ont, rappelle-t-on, rompu en juin dernier leurs relations diplomatiques avec le Qatar. Ils accusent cette petite pétromonarchie de soutenir les Frères musulmans et d'être trop proche de l'Iran. Un crime de lèse- majesté pour Le Caire et Riyad qui font la guerre aux Frères musulmans qu'ils considèrent comme une menace pour leur pouvoir. Pour asphyxier et surtout amener le Qatar à changer de politique, ces quatre pays l'ont isolé. De son côté, Doha a rejeté les accusations qui lui ont été faites et affirmé que le quartet arabe cherchait en fait à mettre sa politique étrangère «sous tutelle».