Situation de pénuries jamais connue, manifestations populaires imposantes et une monnaie nationale qui ne cesse d'être dévaluée ; depuis 2014, le Venezuela connaît une crise majeure sur tous les plans. Des affrontements, des morts et l'exode d'un million de Vénézuéliens. Comment ce pays, ami de l'Algérie et au système quasi similaire en est-il arrivé là ? Il y a une vingtaine d'années, ce pays situé à la pointe supérieure de l'Amérique du Sud renfermait dans son sous-sol les plus importantes réserves de pétrole au monde et était l'économie la plus riche de la région. Le président défunt, Hugo Chavez, s'est servi de cette manne financière pour mettre en place des programmes sociaux aussi bien populaires que populistes. Mais à l'entame des années 2010, le prix du pétrole chuta lourdement et le gouvernement en place, dirigé par le président Nicolas Maduro, dut se résigner à supprimer les aides sociales, lever les subventions sur les produits de consommation courante et réduire drastiquement les importations. Le Venezuela est devenu le pays où l'inflation est la plus forte au monde : 2600% de hausse en 2017. En même temps que la monnaie locale s'effondre, la misère sociale et l'insécurité s'installent. Aujourd'hui, le Venezuela est considéré comme le deuxième pays le plus violent du monde… Si cette courte illustration de la situation actuelle d'une contrée située géographiquement loin de nos frontières nous a tenté, c'est parce que les analystes se plaisent à dresser des analogies pertinentes entre les systèmes des deux pays. Politiquement, le président Nicolas Maduro a réprimé l'opposition et centralisé à son exclusif profit les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Pas besoin d'être grand clerc pour dire que Bouteflika et son entourage cumulent tous les pouvoirs. Economiquement, le Venezuela de feu Chavez avait construit un mode de production mono-exportateur et n'a jamais eu à cœur de permettre l'émergence d'une catégorie de capitaines d'industrie à même de ramener un appoint en devises fortes. Le cas de notre pays est assez similaire, puisque malgré les rengaines utopiques et les vœux pieux appelant à la diversification de l'économie, nous restons à ce jour dépendants du prix du pétrole. Reste à savoir ce que réservera l'après-présidentielle pour le commun des Algériens ? Depuis quelques mois, le gouvernement a opté pour la planche à billets, inscrivant notre économie dans une spirale inflationniste douloureuse pour la couche moyenne et les ménages les plus démunis. Le pouvoir d'achat s'est considérablement ramolli inversement proportionnel aux prix partis à la hausse. La crise s'est imposée de fait dans le quotidien des Algériens et le syndrome vénézuélien n'est pas loin de nos esprits, même si les médias d'Etat et autres assimilés ne font pas trop cas de la situation chaotique de ce pays qui nous est proche à bien des égards. Au-delà de l'opéra vaudevillesque qui se joue chaque jour sur les accotements du palais du gouvernement et incidemment relayés par les télés et les réseaux sociaux (déjà 172 personnes ont retiré les formulaires de candidature et ce n'est pas fini…), le pouvoir, dans ce qu'il a de nébuleux et de démoniaque, semble hésiter à forcer la formule qui lui permettrait de durer sans heurts et sans reproches. Mais il apparaît que comme le Venezuela, l'Algérie sera vite rattrapée par ses réalités : un prix du pétrole stable mais bas, des réserves de change qui fondent de façon inexorable, une pression sociale accrue et un climat politique délétère. 2019 invitera visiblement à une réduction plus importante des importations et une augmentation intolérable des surtaxations (prix de l'électricité, de l'eau, de l'essence, etc.). A l'allure où vont les choses, 2020 se conjuguera forcément avec l'abandon des subventions des produits de première nécessité. Reste plus qu'à trouver l'exécuteur de ces basses œuvres…