«C'est le cri de la jeunesse», essaye de commenter un marcheur pour parler du nombre important de jeunes ayant pris part à cette action. Mobilisation grandiose, hier, dans la ville de Tizi Ouzou, où l'appel lancé sur les réseaux sociaux pour une marche contre un 5e mandat pour Bouteflika a drainé des dizaines de milliers de personnes. La capitale du Djurdjura a été carrément envahie, en l'espace de quelques minutes, d'une marée humaine indescriptible. Des marcheurs affluaient de partout. Le premier carré s'est formé, vers 13h30, et ce, avant que d'autres ne se constituent en un laps de temps très court. Les marcheurs avançaient lentement, en raison de la foule qui était vraiment bigarrée dans la mesure où la tête de la procession est arrivée au rond-point de l'ancienne gare routière, alors que d'autres carrés étaient toujours devant le CHU Nedir Mohammed. La foule a scandé des slogans hostiles au pouvoir comme «Pouvoir assassin», «Non à la mafia de Bouteflika et Ouyahia» et encore «Y en a marre de ce pouvoir». Comme un seul homme, les participants à cette imposante marche ont brandi des banderoles et pancartes sur lesquelles on pouvait lire, entre autres, «Le seul héros, le peuple», «L'Algérie n'est pas à vendre», «Rendez-nous l'Algérie», «La volonté du peuple est une ligne rouge» et «Kabylie chouhada». La marche a regroupé aussi des étudiants et des militants politiques ainsi que des élus du RCD et du FFS. Ils sont tous venus, ont-ils scandé à gorge déployée, pour réclamer le départ du système. «Le pouvoir doit se ressaisir pour annuler la candidature de Bouteflika, car la rue la rejette. Comment présenter un homme malade à l'élection présidentielle ?» a martelé un marcheur, médecin de profession. «C'est un mandat de la honte», ajoute un autre, enseignant de son état. Tous ceux qui ont participé à la déferlante populaire d'hier, dans la ville de Gênets, sont sortis pour dire «Non au 5e mandat», comme ils ont exprimé leur rejet du système qui a, ont-ils crié haut et fort, «bradé les richesses du pays». «Les décideurs doivent partir et rendre l'Algérie au peuple qui décidera de son sort», a déclaré un étudiant, la vingtaine à peine bouclée. Il n'a, sans doute, jamais pris part à une marche de la même envergure que celle d'hier. «Nous voulons une Algérie prospère. Nous voulons vivre notre jeunesse et espérer des jours meilleurs après la fin de notre cursus universitaire. Mais avec un 5e mandat et avec le système actuel, il nous reste que la fuite vers l'étranger, même dans une embarcation de fortune. C'est le désespoir qui va régner en maître dans notre pays. Nous voulons le changement», a-t-il lancé en brandissant l'emblème national. «Des Algériens se sont sacrifiés pour que le peuple puisse vivre dans l'indépendance et la dignité, mais avec ce système corrompu et corruptible, ce peuple vit dans la misère», a-t-il fulminé. Oui, il est important de souligner que beaucoup de jeunes, dont l'âge ne dépasse pas 25 ans, ont pris part à la marche d'hier à Tizi Ouzou. D'ailleurs, on entendait même parfois des slogans du stade qui fusaient de la foule. «C'est le cri de la jeunesse», essaye de commenter un marcheur. «Les jeunes d'aujourd'hui veulent vivre dignement. Ils sont conscients de la gravité de la situation. Le pouvoir ne peut pas les berner, car ils sont tous connectés avec le monde», dit-il au milieu d'une foule qui s'est dirigée ensuite vers le siège de la wilaya avant de se disperser dans le calme. Il faut noter, par ailleurs, que la rue n'a pas connu de répit toute la semaine dans la ville de Tizi Ouzou. Ainsi, après la marche du 22 février, des milliers d'étudiants ont battu le pavé mardi à travers les principales artères du chef-lieu de wilaya. Les avocats aussi n'ont pas été en marge des actions de terrain en faveur du changement de système. Ils ont investi la rue, jeudi, dans la ville des Gênets. D'autres marches contre le 5e mandat de Bouteflika ont été également organisées dans plusieurs localités de la wilaya, comme Tigzirt, Aïn El Hammam, Tizi Gheniff et Ouacifs.