L'année 2005 s'annonce dure et contraignante pour le bureau de Constantine de l'association d'alphabétisation Iqra. Celle-ci vient de tirer la sonnette d'alarme suite aux dernières décisions du ministère de l'Emploi et de la Solidarité nationale, ayant trait à la réduction des postes octroyés dans le cadre de l'emploi de jeunes. Le bureau de la wilaya de Constantine s'est vu supprimer les contrats d'emploi de quarante enseignants dont la plupart sont des filles en poste depuis des années. Ces dernières se retrouvent dans une situation de chômage après un licenciement injustifié en dépit des efforts déployés pour 2275 DA par mois, un salaire de misère. La situation devient de plus en plus critique pour le bureau de Constantine qui active déjà depuis dix saisons et qui couvre 140 classes réparties sur les douze communes de la wilaya, dispensant des cours à 3120 inscrits. « La suppression des quarante postes risque de compromettre sérieusement le programme d'enseignement pour plus de 1600 inscrits », nous dira Djamel Bouhdjar, président du bureau de Constantine qui ajoutera : « Malgré leur licenciement, les quarante enseignants qui n'ont pas été payés depuis le mois de janvier continuent d'assurer les cours grâce à la solidarité exemplaire de leurs collègues. » Une solution provisoire qui risque de ne pas durer longtemps. Il faut rappeler que le centre d'alphabétisation de la wilaya de Constantine compte après ces licenciements 100 encadreurs, dont 10 bénévoles, 74 recrutés dans le cadre du filet social et 16 activant suivant des contrats signés avec la délégation de l'emploi de jeunes. Les mesures du ministère de l'Emploi et de la Solidarité nationale outre le préjudice qu'elles ont porté à des jeunes qui ont toujours prouvé un dévouement sans faille, vont en contresens du discours officiel prônant la mise en œuvre d'une stratégie nationale à long terme pour éradiquer l'analphabétisme, chose qui ne sera pas accompagnée de dispositions concrètes sur le terrain. On n'aura pas besoin d'étaler encore une fois les chiffres alarmants de l'analphabétisme en Algérie où le fléau prend toujours de l'ampleur en raison du phénomène de la déperdition scolaire et de la non-scolarisation des enfants des familles pauvres. Le départ - pour différentes raisons - des compétences, résultat d'une négligence délibérée de la part des autorités concernées, demeure une véritable hémorragie pour l'association Iqra, qui aspirait à ouvrir de nouvelles classes pour des populations en quête de savoir au lieu de perdre celles déjà existant. « Les efforts fournis durant une décennie sont là pour le prouver, car il demeure toujours difficile de convaincre de jeunes diplômés, notamment les universitaires, de venir enseigner dans des classes d'alphabétisation », conclura Djamel Bouhdjar. Suite aux démarches de la présidente de l'association Iqra, une correspondance a été adressée le 17 février dernier par le ministre de l'Education nationale à celui de l'Emploi et de la Solidarité nationale l'incitant à sauvegarder les compétences existantes pour mieux concrétiser le programme national d'alphabétisation. Cet appel est resté jusqu'à aujourd'hui sans écho.