La marche des étudiants, des enseignants et ATS de l'université Abderrahmane Mira, hier à Béjaïa, était marquée par un climat lourd de tristesse. La nouvelle du décès du militant politique et de la LADDH, Kamel Eddine Fekhar, a transformé le rendez-vous hebdomadaire en un véritable hommage au défenseur des droits des minorités réprimées, comme la communauté mozabite de Ghardaïa, que fut le défunt. Les étudiants ont dénoncé, à travers la manifestation antisystème, les pratiques du régime et la mort de Kamel Eddine Fekhar. Le défunt est désormais considéré comme une victime des pratiques du système, qui doit plus que jamais partir, et de sa «justice injuste». La triste nouvelle est tombée mardi en matinée, à travers une communication vidéo de son avocat, Me Salah Debbouz. Rencontré lors de la marche des étudiants, le blogueur Merzoug Touati, la mine défaite et les yeux pleins de larmes, regrette que «rien n'a été fait pour empêcher le sort de Kamel Eddine Fekhar, son avocat n'a cessé d'alerter les pouvoirs publics concernant son état de santé et d'attirer l'attention de l'opinion publique. Cette mort suscite beaucoup d'interrogations». L'homme qui parle a, également, connu les geôles algériennes et les grèves de la faim intermittentes lors de sa détention, deux ans durant. De la procession qui a démarré du campus Targa Ouzemmour s'élève le slogan «Pouvoir assassin», «Béjaïa-Ghardaïa, solidarité !» Les chants utilisés en 2001, lors des événements du Printemps noir, ont refait surface, comme l'indémodable chanson d'Oulahlou, Ijadarmiyen (Les gendarmes). Pour la communauté universitaire, il n'y a pas de doute sur l'implication du régime, par ses pratiques, dans la disparition de Kamel Eddine Fekhar. «Ils ont tué Fekhar, son assassin est le pouvoir !» «Nous, les Amazighs, en avons assez de l'injustice, la mort de Fekhar a brisé nos cœurs», tonne la foule. Sur une banderole déployée devant le carré des enseignants et ATS, on pouvait lire : «L'université pleure le Dr Fekhar, système dégage !» Ainsi, la communauté universitaire s'est indignée du traitement inhumain qu'a subi le militant pendant sa détention. Il faut noter que malgré la détérioration de son état de santé, la demande de liberté provisoire émise par sa défense a été tout simplement rejetée par la justice. Arrivés devant le siège de la wilaya, les étudiants ont observé une minute de silence à la mémoire du défunt. Enseignants, ATS et étudiants ont organisé un rassemblement, où une autre minute de silence a été observée à la place de la Liberté d'expression Saïd Mekbel, à laquelle ont participé des militants du MAK, qui ont tenu à exprimer leur compassion concernant la disparition du militant mozabite. Avant que les marcheurs ne se dispersent, il a été décidé de dédier la marche de vendredi prochain à Kamel Eddine Fekhar, «Assassiné pour ses idées en prison par le pouvoir criminel.»