La remontée des eaux dans les régions d'El Oued et de Ouargla semble avoir été maîtrisée. Il y a quelques mois, un projet estimé à près de 57 milliards de dinars a été finalisé afin de juguler ce phénomène dans les deux vallées. Ouargla. De notre envoyée spéciale. A Oued Souf, ce sont 750 km de conduites qui ont été installées, 57 stations de pompage et de relevage, 51 km de drains verticaux, pour transférer les eaux vers l'exutoire. A Ouargla, il a été installé 118 km de conduites, 28 stations de pompage et de relevage, 100 km de drains horizontaux, ainsi qu'un canal cloisonné de 40 km de longueur. « Vous comprenez, c'est titanesque ! Et ça a réussi ! », s'exclame, admiratif, Nasreddine Hantout, directeur de projet à Ouargla, en marge du séminaire national sur l'eau dans l'agriculture saharienne, organisé les 5 et 6 mai à El Oued. Car au-delà des chiffres et des bilans laudatifs, force est de constater que la réalité d'une région a bel et bien été changée et les retombées positives se font d'ores et déjà ressentir. « Il y a encore moins d'une année, les communes des deux wilayas étaient fréquemment parcourues d'immenses étendues d'eaux stagnantes », se souvient M. Hantout. Et l'on ne peut qu'imaginer les répercussions plus que néfastes de ces remontées sur les citoyens et sur l'environnement. « L'impact était des plus dangereux sur la santé des riverains, comme la propagation des maladies à transmission hydrique, ou encore sur l'urbanisme, avec les dommages occasionnés aux fondations des bâtisses et à la qualité des sols, et ce, sans parler des odeurs nauséabondes qui persistaient et étouffaient les villes », explique M. Hantout. Mais le plus important, ces résurgences risquaient directement de polluer les nappes phréatiques de la région. « Cette problématique était grandement due à une surconsommation de l'eau dans le domaine de l'irrigation, à la démographie galopante et l'effort de développement. Mais comme ces villes ne disposaient pas d'exutoire, les eaux profondes étaient rejetées dans la nappe phréatique, provoquant non seulement sa pollution, mais aussi la remontée des eaux, de par le relief plat de la région, qui empêche l'écoulement gravitaire des eaux usées. » Car il faut dire que le phénomène n'est pas nouveau et que l'on s'inquiétait déjà il y a une vingtaine d'années. Seulement, en parallèle des études effectuées à ce sujet, les caisses de l'Etat étaient vides, les budgets afin de contrer ce fléau n'étaient pas disponibles. D'où le soulagement avec lequel ont été accueillies ces réalisations. « Aujourd'hui, les conditions sanitaires sont améliorées, l'on peut goudronner, poser du carrelage et l'on assiste même au retour des flamants roses dans la région », s'enthousiasme M. Hantout. Mais pas seulement. Car le sol n'étant plus contaminé par une nappe très salée, sa salinité a significativement diminué, entraînant par la même une diminution de la désertification de la région. « La preuve est l'impact plus qu'appréciable qu'il y a eu sur le rendement des cultures », estime Mohamed Chaïbi, responsable du projet au sein de la direction générale de l'Office national de l'assainissement. « Et surtout sur les palmeraies ! Depuis une année, avec la mise en service de ce projet, il n'y a eu aucune résurgence, il y a une réelle régénération des palmiers, qui étaient noyés et périssaient de par ces remontées », affirme l'ingénieur. L'assainissement au service de l'agriculture L'on aura donc compris l'impact de la résorption de ce phénomène sur le développement, fulgurant, de l'agriculture à El Oued, la ville aux Mille coupoles, qui pourrait d'ailleurs être rebaptisée la « ville aux mille pivots ». D'ailleurs, afin de démontrer l'imbrication de tous les domaines, étaient présents à ce séminaire pas moins de trois ministres : Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau, Rachid Benaïssa, ministre de l'Agriculture, ainsi que la ministre déléguée à la Recherche scientifique, Souad Bendjaballah. Toutefois, les principaux concernés, les populations locales, ne semblent pas avoir été assez associés à ce qu'ils jugent comme étant « des palabres de salon ». Le séminaire n'a d'ailleurs pas attiré foule et, faute de sensibilisation de proximité, rares étaient les agriculteurs présents lors des débats. Contrairement aux sorties « sur le terrain » effectuées par les trois ministres. En signe que les populations attendent de ces gouverneurs des actions concrètes, les riverains étaient nombreux à accueillir les délégations. Parmi les dizaines de citoyens, se mêlaient badauds, fellahs en chèche, ingénieurs agronomes, ouvriers exerçant dans ce périmètre agricole ou simples citoyens. Ils sont venus exposer aux ministres et autres responsables locaux leurs préoccupations. Car en dépit des efforts – indéniables – consentis par les pouvoirs publics, les défis restent innombrables. Qualité de l'eau suspecte aux yeux des citoyens, réseaux d'assainissement à étendre, blocage de plusieurs périmètres de concessions agricoles, problèmes d'absence d'actes de propriété des terres agricoles, maladies qui s'attaquent aux palmeraies… « Après avoir parlé durant ces séminaires, il faudrait aussi que les responsables nous écoutent ! », résume un citoyen, après avoir tenté, en vain, d'approcher les ministres.