Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev y sont allés eux aussi, même si l'acte est strictement symbolique, mais fort, il faut bien en convenir. Les Russes n'en reviendront certainement pas de ce qu'ils ont vu hier : les armées de l'Otan paradant sur la fameuse place Rouge. L'occasion, il y en a bien une, c'est la célébration de la fin de la Deuxième Guerre mondiale, une victoire commune aux forces qui se sont liguées contre l'Allemagne nazie et autres puissances de l'Axe. C'est cette démarche qui a été reproduite, hier, soixante-cinq ans après une guerre froide qui portait bien son nom avec un monde divisé en deux blocs diamétralement opposés, avec autant d'arsenaux en mesure de détruire plusieurs fois la planète. Celui de l'Est finira par s'effondrer, conduisant même à la fin des divergences idéologiques, tout le monde finissant par parler le même langage, celui du libéralisme. Reste celui de la puissance. Et si l'ancien président russe avait déclaré un jour que son pays pourrait devenir membre de l'Alliance atlantique, c'était beaucoup plus pour mettre en relief la manière avec laquelle celle-ci avait poussé ses frontières en intégrant des républiques de l'ancienne URSS. Un discours qui sera explicité plus tard et en diverses occasions, notamment lors de la conférence de Munich sur la sécurité avec un discours particulièrement musclé à l'endroit de l'OTAN. Le successeur de Vladimir Poutine n'a pas dévié de cette ligne, mais, avec lui, la Russie a quelque peu soldé son passé, avec les cérémonies commémorant le massacre de Katyn, une espèce de reconnaissance des crimes commis sous Staline. Les Russes, d'ailleurs, ne se privent plus de parler de cette période. En soi, une réelle révolution pour échapper à l'emprise du passé, et replacer, si ce n'est déjà fait, la Russie dans le monde. L'effort en vaut la peine, puisque le rapprochement avec l'Amérique, notamment en matière de désarmement, ne fait pas que des heureux avec une Europe qui se sent quelque peu marginalisée et même éloignée des grandes questions du monde, et des puissances nucléaires sommées, en quelque sorte, de se déterminer par rapport à la perspective d'un monde sans armes nucléaires. Même s'il s'agit d'une vision optimiste, et que l'on dit difficilement réalisable, ces pays ont tout de même dit : « Jamais sans mes armes de dissuasion. » Est-ce tout cela qui a permis la parade d'hier ? En soi, un défilé ne veut pas dire grand-chose. Il n'a pas valeur d'engagement et, jusque-là, la Russie n'y a pas souscrit. Bien au contraire, elle continue à dire ce qu'elle pense de l'OTAN et à s'opposer à son élargissement. Mais le symbole reste fort quant à lui, et l'Alliance atlantique a visé essentiellement cet objectif très certainement. Mais, n'y a-t-il que cela ? Plus question de se tourner le dos, ou de se perdre en discours creux, la Russie, selon ses dirigeants, n'a pas fini son bilan, mais elle a fait l'inventaire de ce qui doit être élagué. En somme, tout ce qui bloque sa modernisation et son développement.