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Paul Euzière et l'Algérie, une œuvre méconnue
Plus qu'un amour, une passion
Publié dans El Watan le 24 - 03 - 2005

Surtout il ne faut pas avoir la mémoire courte. Il y a des hommes sur cette noble et petite terre qui nous marquent à vie, pas seulement par leur charisme mais aussi par le regard qu'ils portent sur le monde des marges oubliées.
Ils n'hésitent jamais à nous mettre en face de nos rêves les plus fous sans faire abstraction du mal qui nous ronge. C'est ce qui ressort de ma rencontre avec Passions algériennes de Paul Euzière. C'est un livre qui a choisi les voies les plus complexes. Il y a en lui quelque chose qui ne ressemble pas a ce qui a été dit sur l'Algérie d'aujourd'hui. Très particulier par sa lucidité et sa clarté mais aussi par son courage et le regard pertinent de son auteur. Un monde disparate, mais très ordonné, où se mêlent objectivité rigoureuse et subjectivité tendre et douloureuse. C'est un livre qui n'hésite pas à dire la douleur enfouie mais aussi le bonheur qu'un pays comme l'Algérie peut nous offrir, un pays d'accueil et d'amour où les liens de générosité et de grandeur se tissent facilement même dans les crises insurmontables. Dans ce livre, Paul Euzière va vers les tâches les plus difficiles, celles d'analyser une situation très délicate où les glissements vers des réponses hâtives sont permanents. Il ne cache jamais sa passion algérienne derrière le rideau d'une objectivité universitaire lourde ou derrière une subjectivité sans fondement. Dire les vérités algériennes qui ne sont pas toujours du goût des médias dominants implique un prix à payer, Paul accepte le défi et va jusqu'au bout de sa logique. D'ailleurs, on ne peut pas comprendre la portée véritable de ce livre sans se mettre dans cette logique imposée par la difficulté de la situation algérienne qui ne prête pas facilement à des schémas préétablis. C'est une réponse cinglante à la logique des raccourcis et des schémas devenus monnaie courante et simplistes. Avec une économie de mots très visible et une didactique très mesurée appuyée par une analyse pertinente, Paul Euzière arrive à dire sa passion avec amour pour la terre qu'il aime et pour ses hommes qui font aujourd'hui son bonheur de modernité, sans masquer les vérités douloureuses d'un système gangrené et gangrenant. Une passion vraie, qui porte une histoire et une définition qui vient du XVIIIe siècle, celle qui, dans les folies meurtrières, a appris aux hommes la raison et le bon sens. L'organisation tripartite choisie par l'écrivain, histoire, actualité et culture, donne au livre et aux questions épineuses analysées plus de substance et plus de visibilité :
I- Histoire
Un retour vers Syphax ou Massinissa n'est évoqué dans ce livre que pour rappeler cet enracinement mal assumé. Avant de rebondir sur la période coloniale en passant par les détails des dynasties après l'avènement de l'Islam en terre algérienne. Le vide creusé par la période coloniale au niveau de l'éducation fait des ravages jusqu'à nos jours, puisqu'il n'a jamais permis à l'Algérie de se constituer en Etat moderne et faire un pas véritable en avant. Avec 14% d'instruits dans toute la société « indigène » en 1958, il n'était pas permis d'imaginer un avenir rayonnant pour l'Algérie, à moyen terme, ni de faciliter les grandes tâches de l'avenir dont essentiellement celle de la citoyenneté qui reste toujours à reconquérir. Ces données nous permettent de comprendre la nature de l'évolution postindépendance. Tous les pouvoirs, qui se sont succédé en Algérie, ont aggravé la situation : les ingrédients d'une guerre civile en 1962, un premier coup d'Etat qui va mettre « hors d'état de nuire » un premier noyau d'Etat, quoi qu'on dise de lui, avait un fonctionnement civil, un GPRA de moins en moins sûr de lui, qui, sous le coup de la force, jette l'éponge au bénéfice d'une situation scandaleuse qui n'a toujours pas dit ses vérités. Ce qui est sûr, c'est que le sinistre article 120 n'a pas interdit la naissance d'une presse libre ; le code de la famille (1984) n'a pas atténué les revendications féminines les plus avancées et les plus audacieuses et une prise de conscience jamais égalée dans la nouvelle société algérienne où l'égalité des sexes s'impose comme un fait social ; le verrouillage de la vie démocratique n'a pu mettre fin à la multiplication du système associatif depuis 1987 et 1988 qui a donné plus de moyens à la société civile, afin de se défendre et de s'exprimer ?
II- Actualité
Dans ce deuxième grand axe, Paul Euzière n'hésite pas à nommer les tueurs, sans toutefois dédouaner le système. Il le fait avec courage et clarté, tout en assumant ses choix devant un système médiatique dominant acquis dans son ensemble à des calculs d'intérêt et à des visions de consommation simplistes. L'intégrisme islamiste n'a jamais caché sa comptabilité macabre et les massacres commis pour faire valoir sa force devant une assistance internationale fébrile, qui, au lieu de s'attaquer à un fléau qui prenait de l'ampleur, lui trouvait tous les moyens de défense et de sortie convenable comme si la société humaine était obligée de passer par un nazisme sans précédent pour prendre conscience de l'ampleur du désastre. L'article de Paul Euzière que le journal Le Monde a refusé de publier en réponse à l'article d'El Pais est l'exemple éclatant de cet aveuglement des médias et de certaines démocraties européennes. Les faits relatés par Paul étaient le fruit de son déplacement en Algérie pour témoigner d'une situation avec un degré d'objectivité très élevé, alors que l'article d'El Pais était le fruit de la plume d'un correspondant du journal au Maroc, loin, même très loin des lieux des massacres qui, dans la chaleur de son bureau et la fluidité des touches de son Mac, imaginait les formules magiques qui répondent à la question épineuse « qui tue qui ? ».
III- Culture
L'écrivain suit attentivement l'évolution culturelle en Algérie par ses déplacements, ses contactés et par ses lectures. Il s'arrête sur plusieurs problèmes dont celui des langues mal assumées où vraiment le fiasco d'une évolution déviée de sa vraie trajectoire se fait vraiment sentir. Peut-être que ce qui arrive aujourd'hui, en Algérie, n'est que la fatalité d'une mémoire occultée ? Le problème des langues n'est là que pour nous donner une leçon didactique et nous rappeler nos blessures et les conséquences d'une mémoire occultée. Paul dans cette dernière partie nous fait rebondir indirectement sur un problème crucial, celui de l'identité qui reste toujours à redéfinir et à réinventer. Les peuples, c'est comme les pierres bleues des fleuves. Elles bougent constamment sous l'influence de différents courants, et il faut être là à chaque fois pour mesurer l'ampleur des mouvements invisibles. Enfin, ce dernier livre de Paul Euzière nous pousse à nous interroger sur une question fondamentale, au-delà de tous les problèmes évoqués, racines, des contradictions non assumées, histoire amputée, langues, etc. Celle de l'écoute des grands moments de silence, des ambiguïtés mal déchiffrées et des fracas les plus tragiques. Beaucoup d'éléments d'analyse nous échappent aujourd'hui dans le décor que nous offre l'Algérie contemporaine, mais ce qui est sûr, c'est qu'une modernité n'est jamais une acquisition toute faite mais un travail de longue haleine qui n'a de l'importance que dans le temps, dans les efforts humains et dans les erreurs pleinement assumées. L'Algérie doit prendre acte, assumer son passé et prendre en main les destinées d'une modernité difficile mais possible ; c'est ça aussi la finalité de la passion de Paul Euzière qui garde dans sa chair une partie de cette terre grande et juste.


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