Conformément au verdict du tribunal de Sidi M'hamed, prononcé en référé dimanche soir, qui déclare leur grève « illégale », les officiers de la marine marchande ont décidé hier de reprendre le travail. Avec beaucoup de dépit, cette décision a été prise à l'issue d'une assemblée générale tenue au siège du Conseil national des enseignants du supérieur (CNES). Le verdict a suscité une grande désillusion chez le Syndicat national des officiers de la marine marchande (SNOMMAR), qui attendait du président du tribunal d'Alger un jugement condamnant « les atteintes au droit de grève » commises par la direction générale de l'Entreprise nationale de transport maritime de voyageurs (ENTMV). Depuis le 26 juin dernier, date d'entrée en vigueur de la grève, le PDG de l'entreprise, M. Cheriet, a en effet procédé à un recrutement massif d'officiers de la Compagnie nationale de navigation (CNAN Group) afin d'assurer l'exploitation des navires, pour faire face à la grogne des officiers intervenant en pleine saison estivale. C'est justement l'explication fournie par le président du tribunal, en plus du fait que l'assemblée générale du 14 juin, qui a décidé le recours au débrayage, s'est tenue en dehors « du lieu habituel de travail ». Le président a estimé, en effet, que la grève des officiers de la marine marchande a eu comme conséquence « la pénalisation des voyageurs ». Tout en astreignant le SNOMMAR à s'acquitter de 50 000 DA par jour s'il persiste dans son arrêt de travail, le tribunal a rendu hier une deuxième ordonnance rejetant la requête du syndicat faisant état d'atteintes au droit de grève et au libre exercice syndical. Se déclarant « étonné » par les deux ordonnances, le SNOMMAR a pour sa part décidé de faire appel. Il estime que le tribunal d'Alger n'a fait que reprendre les arguments de la direction générale de l'ENTMV. « Pourquoi la direction de l'entreprise n'a saisi la justice que dimanche dernier, le jour même où le président du tribunal de Sidi M'hamed devait se prononcer sur notre requête ? Elle devait le faire il y a une vingtaine de jours », s'est interrogé M. Zermoun lors d'une conférence de presse tenue hier au siège du syndicat. Dans une déclaration rendue publique le même jour, le SNOMMAR considère que, sur le fond, « l'appréhension des conditions de tenue de l'assemblée générale qui a décidé le recours à la grève excède la compétence du juge en référé ». Il précise que le lieu habituel de travail pour les officiers de la marine marchande est le navire..., un endroit dont l'accès reste soumis à un contrôle strict pour des raisons de sécurité. D'où l'impossibilité d'y tenir une AG, estime-t-il. Celle-ci s'est, de fait, tenue au siège de ladite organisation syndicale. « Le SNOMMAR est surpris que sa plainte relative aux entraves au libre exercice du droit de grève, constitutionnellement consacré, ait été ajournée suite à la demande de l'employeur. En revanche, le même jour (dimanche dernier, ndlr), la plainte de l'employeur invoquant un abus de forme dans l'exercice du droit de grève est tranchée dans le fond par le juge en référé ! », a-t-il ajouté. Il indique que la correspondance de l'Inspection du travail, déclarant sa grève illégale, a porté préjudice à leur action. « Outre le fait que l'interprétation de la licéité des conditions de tenue de l'assemblée générale relève de la seule compétence des cours et tribunaux, le signataire de la correspondance a tenu à affirmer que les points de désaccord persistants ne ressortaient pas dans l'envoi du syndicat informant l'Inspection du travail de la tenue de l'assemblée générale, et ce faisant, s'est arrogé le droit de faire jurisprudence sur le contenu des correspondances de même nature », a estimé le SNOMMAR, qui accuse l'Inspection du travail d'avoir pris partie pour l'employeur. La direction générale de l'ENTMV et le syndicat des officiers se disent toutefois disposés au dialogue autour des questions socioprofessionnelles.