A Annaba la mendicité prend de l'ampleur. Elle touche de larges pans de la société. Le chômage et la paupérisation en sont à l'origine même si certains, heureusement peu nombreux, pensent encore que quémander est un métier comme les autres. Toujours est-il que les mendiants, jeunes, moins jeunes, femmes et hommes, sont nombreux à investir du matin au soir les places publiques, cafés maures, marchés, restaurants, boulangeries et autres lieux, demandant la charité. Bien qu'il ait existé de tous temps, y compris dans les pays nantis et développés, ce phénomène a dépassé les limites chez nous et devrait tout de même inciter les décideurs à réfléchir sur les voies et moyens à mettre en œuvre pour l'éradiquer ou du moins le réduire. Faut-il condamner les gens qui tendent la main et continuer à croire qu'ils le font exprès pour gagner leur vie sans fournir le moindre effort ? Des femmes, veuves, divorcées et même mariées, qui assiègent les devantures des restaurants, mosquées et boulangeries, disent : « La sadaka (charité) est notre seule source de vie. Heureusement, il y a encore des bienfaiteurs qui soulagent notre vécu difficile et précaire ». L'une d'entre elles, avoue qu' « elle demande la charité pour subvenir aux besoins de ses cinq enfants orphelins et en bas âge. » Elle se dit également prête à abandonner la mendicité contre un travail comme femme de ménage. Une autre abonde dans le même sens et révèle qu'elle préfère « tendre la main au lieu de faire autre chose d'immoral pouvant nuire à l'honneur de sa famille et de ses proches ». La même impression a été relevée chez d'autres femmes qui se déclarent contre l'utilisation de leurs progénitures pour demander l'aumône. « Tendre la main aux passants pour obtenir quelques sous n'est pas une chose de tout repos », affirme un jeune qui rêve d'avoir un jour un travail lui permettant de vivre comme tous les autres de son âge. « J'ai frappé à toutes les portes. Il n'y a pas d'embauche », dit-il avant de parler de ses camarades qui, eux, ont préféré quitter le pays à la harraga dans le but de construire leur avenir là ou ils pourront trouver un emploi et un épanouissement. Les personnes âgées, qui viennent un peu partout des localités périphériques pour déambuler à travers rues, ruelles et places publiques, soutiennent, quant à elles, « qu'elles demandent la charité faute de prise en charge par leurs propres progénitures ». Certaines d'entre elles affirment que leurs maigres retraites n'arrivent pas à couvrir les besoins de la famille. De mémoire de Annabi, la mendicité n'aura jamais atteint un seuil aussi inquiétant. « Le nombre de mendiants ne se mesure pas à celui de la population Il est à rechercher plutôt dans le niveau de développement de la région », prévient un sociologue. Depuis la mise en œuvre du plan d'ajustement structurel (PAS) dicté par le fonds monétaire international (FMI) et le ralentissement des investissements, Annaba a enregistré une alarmante recrudescence de la mendicité.