– Fatiha Benabbou Fatiha Benabbou, spécialiste en droit constitutionnel, est inquiète par la guerre souterraine que mènent certains cercles, d'où l'urgence, selon elle, d'aller vers le dialogue. «Arar m'a fait la proposition et j'ai donné mon accord de principe», explique-t-elle. A la question de savoir ce qu'elle pense de la composante de ce panel, Benabbou réplique : «Je ne suis pas concernée par les autres. Moi, j'ai donné un accord de principe. Je suis pour l'ouverture des portes du dialogue, car je suis très inquiète pour l'avenir de l'Algérie. C'est la guerre souterraine que mènent certains qui m'inquiète.» Pour cette constitutionnaliste, iI y a des principes que l'on doit absolument défendre. «Que les personnalités soient acceptées ou pas n'est pas un problème. Avec ou sans ces 13 personnalités, le dialogue se fera. Autant le faire avec des personnes convaincues et dont l'objectif est l'instauration d'un Etat de droit. Il s'agit de faire avancer l'Algérie dans le bon chemin : une démocratie constitutionnelle.» De l'avis de Benabbou, il ne reste que deux solutions : un dialogue sincère pour faire avancer l'Etat de droit, ou une confrontation qui mènera l'Algérie droit dans mur, et tout le monde sera perdant. Plus il y a de bonnes volontés, plus il y a de chances de s'en sortir. – Nacer Djabi Nacer Djabi a accepté de faire partie de ce panel tout en ignorant les tenants et les aboutissants de cette action. «Comme j'ai participé à toutes les marches et les initiatives susceptibles d'apporter une solution à la crise, je ne pouvais refuser une offre de dialogue. Arar m'a appelé, il m'a soumis une proposition. J'ai dit oui, mais sans plus de détail.» Concrètement, comment ça va se passer sur le terrain. Djabi n'en a aucune idée. «Le mouvement populaire ne veut pas du gouvernement de Noureddine Bedoui, alors il ne peut pas y avoir de dialogue avec cet Exécutif.» – Mustapha Bouchachi Mustapha Bouchachi doute que ce panel soit accepté et mandaté par le pouvoir ! «Nous sommes pour le dialogue, mais pas à n'importe quel prix. Nous avons des conditions. Nous ne voulons ni de Bedoui ni de Bensalah, les symboles du système doivent partir. Un dialogue sous-entend que ses résultats doivent être pris en considération et l'Etat doit obligatoirement les exécuter.» Pour Bouchachi, il est inconcevable que l'actuel Premier ministre qui a cautionné la fraude électorale de ces dernières années organise l'élection présidentielle. «Le hirak refuse aussi que le chef de l'Etat par intérim accompagne cette période de transition.» Comment peut-on aller vers un dialogue alors que des Algériens sont jetés en prison pour leurs opinions. «Libérez les prisonniers du hirak, levez toutes les pressions sur le hirak, libérez la parole au niveau des espaces médiatiques et à partir de là, nous pouvons entamer le processus de dialogue.» – Smaïl Lalmas Cet expert en économie estime que la première condition pour participer à ce dialogue est que le peuple accepte d'abord la composante de ce panel, ensuite il y a des préalables qui ne sont pas à négocier. «Il y a beaucoup de noms qui circulent depuis plusieurs semaines déjà. Pour moi, l'une des conditions pour accepter de faire partie de l'équipe de dialogue, c'est que je sois vraiment accepté par la population. Et que le dialogue tel qu'il sera entrepris soit aussi accepté par le peuple.» «J'ai donné mon accord de principe, car il s'agit d'un dialogue qui va faire sortir l'Algérie de cette impasse. Si toutes les conditions nécessaires et souhaitées pour entreprendre ce dialogue sont garanties, je pense que c'est un devoir de faire l'impasse sur mes ambitions personnelles et m'inscrire dans cette dynamique. S'il s'agit d'un appel du peuple, moi, je ne peux dire que oui. Je ne peux pas refuser», note Lalmas qui pose des préalables : il appelle à des mesures d'apaisement de la part du pouvoir, à commencer par la libération des détenus d'opinion à leur tête le moudjahid Lakhdar Bouregâa, le départ immédiat du gouvernement Bedoui installé par l'ancien régime, et aller vers la mise en place d'un gouvernement de compétences accepté par le peuple. Lalmas plaide aussi pour que la commission qui sera mise en place, après avoir été acceptée par le peuple, ait de larges prérogatives et des outils pour lui donner la crédibilité nécessaire pour conduire le dialogue. – Lyes Merabet Pour le docteur Merabet, le principe de la médiation et du dialogue doit être au centre des préoccupations de tous les acteurs représentant autant l'opposition politique, la société civile que le pouvoir. «Personnellement, je défends ce principe, car il constitue l'unique voie de sortie de la crise politique actuelle ou plutôt de l'impasse dans laquelle le pays a glissé.» «Des représentants du Forum civil pour le changement m'ont fait part de leur intention de proposer un panel de personnalités chargé de la médiation et du dialogue et que mon nom serait éventuellement dans la liste. J'avoue que c'est un honneur pour moi, mais qu'il y a d'autres personnes plus aptes et compétentes pour être dans de telles missions. J'ai expliqué aussi qu'une telle initiative mériterait une concertation plus large et plus approfondie dans le cadre de la dynamique de la société civile, dont la CSA est partie prenante. Ça reste une initiative comme d'autres, elle est à saluer mais le plus important est dans sa perception par le hirak.» Merabet a insisté sur le fait que la médiation et le dialogue ont besoin d'un climat de confiance et des mesures d'apaisement doivent être prises, comme la libération des détenus pour délit d'opinion. – Karim Younès L'ancien président de l'APN a dit espérer «être digne de la confiance» placée en lui. «A l'instar d'autres personnalités, la société civile vient de me solliciter, officiellement, afin que je puisse apporter ma contribution et rejoindre les efforts de ceux qui sont à la recherche des voies et moyens de sortie de crise», a-t-il indiqué dans un communiqué rendu public. Cette initiative, selon lui, entre dans le cadre d'un processus souverain de médiation, entre les enfants de la patrie et s'inscrit donc dans l'esprit des revendications légitimes des millions d'Algériennes et d'Algériens qui sont sortis dans la rue pour exprimer leur colère et leur désir de changement. «Conscient que l'impasse politique que nous vivons est porteuse de risques, je reste persuadé que seule une démarche concertée avec l'ensemble des acteurs de la société est en mesure de favoriser une issue pacifique et conforme aux attentes des Algériens. Je ne peux donc me dérober à mon devoir de citoyen, tout en espérant être digne de la confiance placée en moi», conclut Karim Younès.