Alain Caron n'est jamais venu en Afrique. Constantine est la première ville du continent qu'il visite. Constantine. De notre envoyé spécial Son émotion était apparente, mardi soir au Théâtre régional de Constantine(TRC) où se déroule le festival Dimajazz, lors d'un concert mené de main de maître. Ce jazzman canadien, qui fait presque parler sa basse à six cordes, semblait heureux devant un public acquis. « J'ai aimé les sourires sur les visages qui étaient en face », nous a-t-il confié après le spectacle. Il a, dès le départ, offert aux présents un extrait de son nouvel album, qui ne porte pas encore de titre, et dont la sortie est prévue pour l'automne prochain. Ce sera le septième album solo de ce grand spécialiste du jazz-fusion. Il a pendant longtemps travaillé aux côtés de Michel Cusson avec le groupe Uzeb de Montréal. Accompagné de John Roney au clavier, de Simon Langlois à la batterie et Pierre Cote à la guitare, Alain Caron a joué mardi soir du jazz speed et frais. Ce jazz électrique qui fait appel aux sonorités rock à l'image de ce morceau au titre éloquent Pole position. Alain Caron, en quête perpétuelle de la perfection acoustique, a également interprété Grand café où les influences sud-américaines sont fort présentes, comme l'odeur de l'arabica dans une maison de campagne ! « Je continue toujours à chercher de nouvelles choses, de nouvelles influences », a confié Alain Caron. La rencontre avec des batteurs cubains a convaincu ce grand joueur de basse fretless à puiser dans les trésors mélodiques latins. Cet habitué des scènes mondiales, grâce notamment aux tournées avec Leni Stern Band, et sa présence remarquée au célèbre festival du jazz de Montréal, Alain Caron a reconnu publiquement que le voyage de Constantine valait le coup. Et, il a promis de faire davantage de recherche sur la musique algérienne pour des créations futures. Sur un autre registre, les Français Philippe Petrucciani et Nathalie Sylvie Blanc, qui avaient commencé la soirée, ont eux mis en valeur du jazz à l'ancienne. Tea for two (un thé pour deux) était la première chanson interprétée par Nathalie Sylvie Blanc et arrangée par Philippe Petrucciani. La voix de la chanteuse communiquait à merveille avec les notes de la guitare basse de Dominique Di Piazza. Ce Sicilien de naissance est également une célébrité dans le jazz land. Inspiré, autant que Alain Caron d'ailleurs, par le bassiste américain Jaco Pastorius, le maître du son fretless, Dominique Di Piazza a développé le jeu à la main droite qui fait sa particularité. En 2008, après une tournée en Inde, Dominique Di Piazza a publié un nouvel album, Princess Sita avec le guitariste brésilien Nelson Veras et le batteur français Manu (Emmanuel) Roche. Manu Roche, très connu dans la scène du jazz européen, était présent au concert du Dimajazz. Son jeu a beaucoup plu aux jeunes du TRC. Autant que les chants en anglais, en espagnol et en français de Nathalie Sylvie Blanc qui, ce soir-là, n'a pas joué au clavier. L'artiste associait les variations de la voix à la gestuelle, soulignant une certaine sincérité dans son interprétation. Les clins d'œil au blues étaient évidement visibles. Le souci de la liberté était également présent dans le chant aérien et quelque peu lyrique de Nathalie Blanc, même lorsqu'elle était en duo avec son époux Philippe Petrucciani à la guitare. La musique chez les Petrucciani est une affaire de famille. Les frères Tony, Michel et Philippe avaient été longtemps guidés par leur père Tony, un guitariste. Ils étaient inspirés par Bill Evans et Tal Farlow. Hier soir, l'Indien Lakshminarayana Subramaniam a animé un concert-événement au Dimajazz. Nous y reviendrons.