Les policiers, les gendarmes, les magistrats, entre autres, forment des pools de spécialistes de la cybercriminalité. Qu'en est-il des services secrets qui semblent bien avancés dans leur dispositif de surveillance ? Les services secrets recrutent au niveau de l'Ecole nationale supérieure d'informatique (ESI, ex-INI, à Oued Smar, est d'Alger). Ils ciblent les majors de promotion, une dizaine par an, ceux qui ont de bonnes notions en cyber-sécurité. Ils les approchent et leur proposent une formation aux Etats-Unis. En fait, le gouvernement importe du matériel et des logiciels de surveillance des USA - prétextant sa lutte contre les forums djihadistes - mais ne veut pas de spécialistes étrangers ici de peur des fuites. Il semblerait aussi qu'ils recrutent carrément des hackers, des As, en les retournant ou en les menaçant de poursuites. Comment se déroule concrètement la surveillance de l'Internet algérien ? Les services surveillent notre Internet à travers plusieurs paramètres, notamment par des mots-clés et en ciblant des sites ou des personnes détectées grâce à leur adresse IP. Concernant les mots-clés, des moteurs sur Internet détectent l'emploi de certains mots (par exemple « djihad », « explosifs », « combats », etc.) qu'on a préalablement fait entrer dans la machine qui traque. Après, ils pistent d'où vient le message à travers l'adresse IP. L'autre dispositif de surveillance adopté par le gouvernement est la « sécurisation » des serveurs en les regroupant : par exemple, tous les serveurs internet publics sont peu à peu regroupés chez Djaweb, la plateforme web d'Algérie Télécom. Il s'agit de regrouper pour mieux surveiller les flux. Par contre, ce sont les cybercafés qui posent actuellement problème au gouvernement. C'est d'ailleurs à partir de là qu'activent les hacker. Les autorités n'arrivent pas à contrôler facilement l'accès à Internet dans les cybercafés parce qu'ils ont chacun un seul IP. C'est pour cela que les autorités évoquent l'installation de caméra à l'entrée des cybercafés ! Les e-mails et les discussions sur Internet ne peuvent plus être privés alors ? Effectivement. Les services s'intéressent aux systèmes d'email les plus populaires, Hotmail et Yahoo !. Gmail reste peu surveillé parque ce qu'il est peu utilisé (pour le moment). On pensait généralement que Skype était bien protégé. C'est faux : il est facilement pénétrable. En fait, dès qu'on ouvre une fenêtre de discussion sur son ordinateur (via MSN Messenger, Facebook, etc.), c'est comme si on ouvrait une faille : quelqu'un peut rentrer dans votre ordinateur à travers les ports ouverts du chat. Qui sont, à votre avis, les personnes ciblées par ces surveillances ? Le gouvernement n'est pas intéressé par la surveillance des comptes personnels du citoyen lambda, ce qui l'intéresse vraiment ce sont les activistes, les personnes qui expriment des opinions sur le web.