Mohamed BoudiafLe 23 mars 2005, les prétoires de pas moins de 3 cours de justice (Annaba-Guelma-Tébessa) et des tribunaux sous leur compétence avec en plus ceux de Souk Ahras et El Tarf se sont fixé rendez-vous au palais de justice Mohamed Boudiaf à Annaba. Pour la première fois, en présence d'un représentant du ministère de la Justice, de Paul Nemo, avocat français et président de l'Union internationale des avocats, d'El Bahi Abdelwahab avocat, président du Conseil tunisien de surveillance des élections présidentielles, président du conseil national de conciliation, les hommes en noir ont été autorisés à plaider pour « les droits à la défense » sans être habillés de leur robe noire. A l'ombre du chahid Ali Boumendjel dont la Journée nationale porte le nom, décédé le 23 mars 1957 dans les geôles du général Aussaress, ils l'ont fait d'une manière magistrale. Etaient intervenus Me Ali Haroune, avocat, ancien ministre et ancien membre du Haut Conseil de l'Etat ; Amar Bentoumi, ancien bâtonnier, ancien ministre de la Justice et un des rares avocats algériens qui avaient été chargés par les responsables de la guerre de libération de défendre les militants et combattants pour l'indépendance de l'Algérie. Des plaidoiries de grandes envolées, les hommes en noir en ont entendu plusieurs. Il n'y avait pas d'accusés mais des droits que les avocats devaient défendre devant les magistrats. Bon nombre de ces derniers avaient été invités pour la circonstance dont le président de la cour de Annaba, son homologue de Guelma, les procureurs généraux des trois cours de justice Annaba-Guelma-Tébessa, les walis ou leurs représentants de Annaba et de Guelma. Dans ce palais de la culture mythique qui avait vu passer et mourir assassiné Mohamed Boudiaf, dont il porte le nom, un autre grand homme défenseur du droit, de la justice et de la liberté d'expression, les plus vieux routiers des barreaux d'Algérie et de France ont fait vivre à l'assistance de belles envolées. Celles que l'on voit rarement dans nos prétoires. Celles-là mêmes qui donnent à la défense toute son importance et à la justice toute sa noblesse. « Nous ne voulons plus de ce statut d'auxiliaire de justice mais le titre d'avocat tout court. Nous le sommes et nous resterons. Bon nombre d'entre nous comme notre regretté confrère Faïdi Ahmed ont laissé leur vie au prétoire, dans leur cabinet ou lors d'une audition. Ils ont plaidé dans tous les tribunaux y compris ceux d'exception. Ils l'ont fait dans le strict respect de l'éthique et de la déontologie qui dicte leur démarche et en ayant à cœur, le principe sacré des droits de la défense », a indiqué Me Nedjoua bâtonnier des avocats de Annaba, Guelma et El Tarf. Juristes infatigables, Me Ali Haroune et Me Amar Bentoumi furent tout simplement époustouflants en vérités vraies sur la mission des avocats, des risques qu'ils ont encourus et qu'ils encourent toujours dans l'accomplissement de leur noble mission. Ils ont parlé d'Ali Boumendjel, cet autre grand homme et un des rares avocats algériens durant la révolution. Il avait été pratiquement kidnappé par la soldatesque coloniale. Sur les ordres du général Aussaress le tortionnaire, il avait été torturé avant d'être achevé 43 jours après son enlèvement. Aussaress et ses acolytes avaient tenté de faire croire qu'Ali Boumendjel s'était suicidé. Ils ont cité des centaines d'avocats français qui n'avaient pas hésité à défendre en France et en Algérie des combattants algériens emprisonnés et torturés durant la guerre de libération. En juristes infatigables ayant fait de la défense leur mode d'existence avec Me Amara Abderahmane au titre de modérateur, Me Ali Haroun, Amar Bentoumi et Paul Nemo avaient beaucoup de choses à dire sur la noble mission des avocats, des hommes et des femmes des prétoires et des combattants pour les droits de la défense à servir la justice et les justiciables.