La campagne de la pêche au thon rouge, entamée le 15 mai, risque d'être complètement ratée pour l'Algérie. Plus de dix jours sont déjà passés sur le lancement de cette campagne qui prendra fin le 15 juin prochain et l'administration des pêches n'a toujours pas autorisé les thoniers nationaux à y participer. « Nous avons tenté de nous approcher du ministère pour avoir des explications sans aucun résultat. Aucun responsable n'a daigné nous recevoir. Nous attendons toujours qu'on nous délivre cette autorisation, sans laquelle nous ne pourrions aller à la pêche. Il nous reste près de vingt jours et nous espérons que la situation soit débloquée rapidement », relève un thonier algérois qui affirme avoir participé à la campagne de l'année dernière. Beaucoup d'armateurs s'inquiètent quant à leur avenir qui s'annonce sous de mauvais auspices. « Nous avons beaucoup investi pour cette année, notamment dans les navires. Rater cette saison risque de nous conduire à la faillite », lance-t-il comme un appel de détresse. Les étrangers sont interdits de pêcher dans les eaux sous juridiction algérienne, comme le stipule un arrêté ministériel publié au début du mois courant. Les armateurs algériens pensaient que cette interdiction a été décidée afin de permettre aux pêcheurs nationaux de se réapproprier les eaux territoriales nationales qui, pendant des années, étaient exploitées par des étrangers. Mais ils se retrouvent à leur grand étonnement face à une forme d'interdiction totale de la pêche au thon rouge dans les eaux algériennes, cela au moment où de grands thoniers étrangers tentent par des voies détournées d'arracher une part du quota de l'Algérie qui risque de ne pas être exploité. La pêche au thon rouge est, faut-il le rappeler, soumise à des conditions plus strictes, dictées par la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (ICCAT) afin de préserver cette espèce surexploitée en Méditerranée. Un système des quotas a été mis en place depuis plusieurs années. L'Algérie a le droit de pêcher 1500 tonnes par an. Théoriquement, ce quota n'a jamais été atteint. Mais le dernier rapport de l'ICCAT affirme le contraire. Ainsi, l'Algérie a pêché de 1984 à 2008 plus de 27 tonnes. En 2008, elle a atteint plus de 1300 tonnes, alors que les armateurs algériens disent n'avoir pêché que de modiques quantités. Les étrangers ne pouvant exploiter que 20% du quota, comment a-t-on pu atteindre cette quantité ? Il y a bien anguille sous roche. Le thon rouge vaut de l'or et il est très demandé sur le marché international, surtout depuis que sa pêche est considérablement réduite. C'est donc un marché qui attire les prédateurs de tous bords. En 2009, quatre Algériens, dont deux responsables du ministère de la Pêche, et cinq Turcs ont été arrêtés pour pêche illicite, contrebande et trafic d'influence. Ils ont été condamnés par le tribunal de Annaba à trois ans de prison ferme. Leur peine a été assortie d'une forte amende.