Des partis ayant plaidé pour un règlement de la crise à travers un processus électoral, à l'instar du MSP, décident de boycotter la présidentielle du 12 décembre. Il y a de plus en plus de figures politiques, de partis et de personnalités nationales qui refusent de prendre part à l'élection présidentielle fixée au 12 décembre prochain. Après l'annonce de Ali Fawzi Rebaïne, président de Ahd 54 et plusieurs fois candidat à la magistrature suprême, de sa non-participation à ce scrutin, c'est au tour de Abdallah Djaballah, président du Front pour la justice et le développement (FJD), et de Abderrazak Makri, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), de suivre le même chemin. La non-participation de ces deux «poids lourds» du courant islamiste va assurément renforcer le front des boycotteurs qui s'élargit ainsi au fil des jours. Leur refus de prendre part à cette échéance électorale contestée par des pans de la société est important surtout lorsque l'on sait que le parti de Abdallah Djaballah ainsi que celui de Abderrazak Makri ont toujours plaidé pour une solution à la crise par voie électorale. Autrement dit, il s'agit de deux formations politiques qui étaient dès le début de la crise contre l'option d'une Assemblée constituante et plutôt favorables à une présidentielle dans les meilleurs délais mais qui considèrent, dans le contexte actuel, que les conditions ne sont pas encore réunies pour la bonne tenue de ce scrutin. Ainsi donc, la voix de ces défenseurs d'un règlement de la crise politique à travers les urnes s'ajoute à celle des partisans d'une transition et d'un processus constituant. En effet, les partisans d'une période de transition, essentiellement regroupés dans ce qui est appelé l'Alternative démocratique, ont dès le départ annoncé la couleur en rejetant l'option électorale et défendant «le nécessaire passage par une courte période de transition» avec le départ de tous les symboles du régime Bouteflika. Il s'agit du FFS, du RCD, du PT, du PST, de l'UCP, du MDS et du PLD, auxquels s'est jointe la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) de l'avocat Noureddine Benissad. D'autres partis, qui ne sont pas dans ce pôle politique, ont également déclaré leur boycott de ces élections. C'est le cas, par exemple, de Jil Jadid de Soufiane Djilali, qui a appelé le pouvoir à annuler cette présidentielle, considérant que le timing n'était pas bon. Ce parti, qui avertit contre la montée des tensions et la radicalisation du mouvement de contestation, estime que «dans ces conditions, le dialogue officiel n'a pu consacrer des mesures d'apaisement qui auraient dû lui donner ses meilleurs arguments». Cette formation prône la «troisième voie, celle de la sagesse, avec l'assentiment de tous», qui pourrait tracer «le chemin de l'espoir». La liste ne s'arrête pas là. Les décisions de boycott s'enchaînent. Le Parti de la liberté et de la justice (PLJ), de Mohamed Saïd, proche d'Ahmed Taleb Ibrahimi, a, pour sa part, annoncé son boycott de ce scrutin. Réitérant son soutien au hirak, ce parti considère que «les données actuelles n'encouragent nullement l'organisation d'élections». Le PLJ estime que rien n'a été fait par le pouvoir pour «privilégier l'option consensuelle» pour laquelle il ne cesse de plaider. Le PLJ se dit ainsi «convaincu que l'issue urgente à la sortie de l'impasse politique et le soulagement du citoyen passent impérativement par un dialogue sérieux et responsable, seule voie pour la construction du consensus national exigé aujourd'hui plus jamais». Il se dit également convaincu que «les élections projetées doivent émaner d'un consensus, car toute élection consensuelle dégagera un président consensuel». L'ancien Premier ministre Ahmed Benbitour a, de son côté, refusé de se porter candidat à cette élection, estimant qu'il ne pouvait pas se dresser contre «la volonté d'un peuple qui sort chaque semaine pour la liberté et la démocratie». Aussi, Abdelaziz Rehabi, ancien diplomate, qui a œuvré pour une conférence nationale du consensus, a affirmé qu'il n'était pas candidat à la présidentielle. «Je voudrais informer que je ne suis pas candidat à la prochaine élection présidentielle, remercier et exprimer ma gratitude à ceux qui m'ont demandé de le faire ainsi qu'à ceux qui militent pour une solution politique globale et consensuelle à l'impasse politique que connaît notre pays, l'Algérie», a-t-il écrit dans une déclaration publiée le 25 septembre sur sa page Facebook. M. Rehabi a été l'un des artisans de la conférence nationale du dialogue qui a regroupé une dizaine de partis et une cinquantaine d'organisations et d'associations le 6 juillet dernier à Aïn Benian. Les participants à cette conférence avaient posé des préalables à une élection présidentielle, dont le départ du gouvernement Bedoui, la libération de l'action politique de toute entrave, la libération des manifestants pacifiques, l'ouverture des médias à l'opposition et la levée d'entraves devant les marches populaires pacifiques, notamment autour de la capitale. Des mesures d'apaisement figurant également dans le rapport final du panel du dialogue national présidé par Karim Younès. Ainsi donc, pour une bonne partie de ces forces politiques, l'absence de gestes forts d'apaisement de la part du pouvoir constitue la principale raison de leur boycott de ce rendez-vous électoral auquel participeront des figures politiques bien connues, à l'instar de Ali Benflis, Abdelaziz Belaïd, Abdelmadjid Tebboune et fort probablement Abdelaziz Belkhadem.