Sétif , Skikda : les hirakistes reviennent à la charge Intervenant 24 heures après l'investiture de Abdelmadjid Tebboune comme nouveau président de la République, le 44e vendredi du mouvement citoyen n'a pas faibli à Sétif, où des centaines de hirakistes se sont rassemblés aux abords de l'entrée principale du siège de la wilaya, où l'on n'a pas trouvé trace, cette fois-ci, de l'imposant cordon de sécurité de la semaine dernière. Notons que l'intronisation de Tebboune et ses appels au dialogue ne font pas l'unanimité au sein des protestataires qui restent partagés. Pour les uns, le nouveau Président doit, au préalable, libérer, sans conditions aucune, tous les prisonniers d'opinion. «Sans un geste fort et des mesures concrètes, on n'est pas disposés à lâcher prise», soulignent des hirakistes ne fermant pas les portes du dialogue. Pour les autres, Tebboune n'est ni plus ni moins que le maintien, pour ne pas dire le prolongement de l'ancien régime. Cette méfiance est aussi palpable à Skikda où les inconditionnels du hirak local ont de nouveau investi la rue hier pour dire encore une fois qu'ils ne se reconnaissent pas les élections et leurs résultats et aussi pour manifester leur soutien à «nos frère d'Oran, de Témouchent et de Oued Souf» lisait-on sur l'une des pancartes brandies. Plusieurs autres slogans ont également été brandis : «Ma votinach et raïs taâkoum, ma ymettelnach !» (On n'a pas voté et votre Président ne nous représente pas) et aussi «Puisque vous dites que nos revendications sont légitimes, pourquoi appeler au dialogue alors». La marche d'hier a également été ponctuée par le port de sachets transparents contenant de la farine que des dizaines de manifestants ont exhibés le long du trajet qui les a menés de la place du 1er Novembre jusqu'à celle des Martyrs en scandant : «Echaab yourid cocaïne !» (Le peuple veut de la cocaïne). K. Beniaiche, K. Ouhab Bordj Bou Arréridj , Jijel : le hirak inflexible La 44e marche populaire pacifique à Jijel hier a très fortement réaffirmé le préalable de la libération des détenus politiques avant tout autre démarche avec le «système» toujours en place. La foule était, certes, un peu moins nombreuse qu'au lendemain du scrutin présidentiel, mais les revendications n'ont pas pris une ride, bien au contraire, elles se sont enrichies avec de nouveaux slogans pour répondre à la nouvelle situation post-élection. Ainsi, outre le traditionnel «Etat civil et non militaire !» on entendra «Libérez les détenus, ils n'ont pas vendu de cocaïne !» ou encore «Ô ya îssaba, habou yethawrou maâna, wa hna rana rafdine, khawetna fessoujoune !» (Ô bande, nous refusons de dialoguer tant que nos frères sont toujours en prison), alors que le nouveau Président est décrié et sa légitimité remise en cause par les manifestants. Sur un écriteau, on affirmait «Prétendre gouverner un peuple, c'est partager ses convictions», alors que sur d'autres, on pouvait lire : «Vous avez un Président illégitime, nous avons des revendications légitimes» et «Le combat continue, hirak source de liberté». Un hirak qui n'est pas près de prendre fin à Bordj Bou Arréridj, puisque des centaines de hirakistes se sont donné rendez-vous hier pour la 44e marche, entonnant les mêmes slogans hostiles à l'ancien comme au nouveau régime en place. «Maranach habssine !» (Nous n'arrêterons pas), «Libérez les détenus d'opinion !» entre autres messages lancés par les marcheurs inflexibles. Fodil S., M. A.
Annaba, Oum El Bouaghi: les manifestants rejettent le nouveau Président Ceux qui ont misé sur l'arrêt du hirak au lendemain de l'investiture du nouveau président, Abdelmadjid Tebboune, ont été déçus. Pire, les manifestants de la wilaya de Annaba ont mis, hier, en cause sa légitimité et l'ont prié de dégager. En effet, sur le cours de la Révolution, la plus importante place publique de la wilaya de Annaba, ils étaient des centaines, hommes, femmes et enfants, à scander longuement : «Allah Akbar wel vote mezaouer !» (Dieu est grand, le vote est truqué). Les mêmes manifestants ont rejeté l'offre du dialogue qu'a proposée le nouveau Président en criant, d'une seule voix : «La hiwar, la hiwar, irahlou !» (Pas de dialogue, pas de dialogue, dégagez). Les manifestants, qui réclamaient hier la souveraineté au peuple, promettent de continuer à battre le pavé jusqu'à la naissance d'une nouvelle Algérie, démocratique, des libertés et de droit. Les services de sécurité, il y en avait en nombre, hier, en civil et en uniforme, mais sans aucune intervention remarquable, contrairement aux semaines dernières. Ils étaient en retrait épiant de loin l'évolution du mouvement populaire. Vendredi dernier, ils ont interpellé des dizaines de manifestants avant que le mouvement citoyen ne soit entamé. Interrogé à cet effet, un jeune habitué du hirak à Oum El Bouaghi considère que rien n'a changé et que le système est le même, distillant toujours un discours populiste auquel plus personne ne croit. Et aux hirakistes de crier à tue-tête : «N'agitez pas l'épouvantail de la décennie noire alors que nos enfants sont au chômage !» ou encore «El irhab el watani yahgar ezzawali !» (Le terrorisme national méprise le pauvre) et ce pour dénoncer les brutalités de la police à l'encontre des manifestants de la ville d'Oran. De temps à autre, la foule reprenait les slogans des vendredis passés. M.-F. G. et L. Baâziz Guelma, Biskra : le mouvement populaire toujours vivace En ce premier vendredi de hirak à Guelma, après l'investiture du président Abdelmadjid Tebboune, le 44e successif depuis le 22 février de l'année en cours, la marche pacifique est incontestablement à l'épreuve de l'endurance. Hier encore, ils étaient des dizaines d'irréductibles à battre le pavé pour réclamer la libération de tous les détenus d'opinion. C'est avec un œil caché par un pansement en solidarité avec les hirakistes qui ont subi des «violences policières» que les marcheurs, hommes et femmes, ont parcouru les rues et boulevards habituellement empruntés à Guelma. Quant aux slogans scandés par les hirakistes, beaucoup les ont «jugés» à la limite de l'agression verbale en direction du nouveau Président fraîchement élu : «Il y a des limites à la liberté d'expression. Ne serait-il pas plus sage d'accorder le bénéfice du doute au lieu de condamner et d'injurier.» La même solidarité est relevée à Biskra, où plusieurs manifestants avaient un pansement sur l'œil. Tous ont scandé des slogans hostiles aux tenants du pouvoir et au nouveau locataire d'El Mouradia, avant d'entamer une marche à travers les grands boulevards et avenues de la Reine des Ziban. «Etat civil et non militaire. Ces élections sont truquées et ce Président est en toc et falsifié. A bas la mafia, Tebboune ne nous représente pas. Nous ne ferons pas marche arrière, ce régime est à mettre à la fourrière. Vous ne pouvez pas flouer le hirak avec vos manigances et entourloupettes. Libérez les détenus d'opinion. Ô ! Ali La Pointe, vois ce qu'il advient du pays. La main dans la main, nous obtiendrons l'indépendance», ont-ils chanté en chœur. «Nous voulons une Algérie libérée de l'emprise des généraux, un Etat démocratique et de droit pour tous les habitants de cette terre pour laquelle nos martyrs ont sacrifié leur vie. Le hirak restera vivace tant que les revendications populaires ne seront pas sérieusement prises en charge», a souligné un fidèle et inconditionnel activiste du hirak. K.Dadci, H. Moussaoui