Le Paraguay, qui tentera de se qualifier aujourd'hui contre l'Espagne pour sa première demi-finale d'un Mondial, s'appuiera sur sa solide défense et sa traditionnelle rage de vaincre, mais avec un atout de plus : le guarani, une langue déroutante pour ses adversaires hispanophones. « Cette façon de communiquer nous est fondamentale, notre langue est la clé de tout ce que nous pouvons réaliser sur le terrain », assure le défenseur central, Julio Cesar Caceres. Depuis le début de la compétition, les joueurs de l'Albirroja n'ont pas encore eu besoin d'utiliser cette botte secrète face à l'Italie, la Slovaquie ou la Nouvelle-Zélande en phase de groupes, puis face au Japon en 8e de finale, des pays non hispanophones. « C'est normal de l'utiliser, c'est notre langue », justifie Caceres. Parlé par 90% des sept millions de Paraguayens, le guarani est devenu langue officielle du pays, avec l'espagnol. Hérité des ethnies amérindiennes qui vivaient dans ces régions d'Amérique du Sud entre la fin du XVe et le début du XVIe siècles, ce dialecte indigène a été le premier à obtenir le statut de langue officielle. Sur l'ensemble du continent sud-américain, le guarani serait parlé par quelque huit millions de personnes. Essentiellement au Paraguay, unique pays bilingue de la région, mais aussi en Bolivie, en Argentine et au Brésil, où la ville de Tacuru (à la frontière du Paraguay) l'a récemment adopté comme langue officielle en plus du portugais. Guarani contre catalan Sur la pelouse de l'Ellis Park de Johannesburg ce soir, l'Espagnol Carles Puyol aura du mal à saisir les ndyry (attaquer), mbota (tirer), hasa (passer) lancés par le Paraguayen Roque Santa Cruz à ses coéquipiers. Surtout sur les phases de jeu arrêté, où les consignes indéchiffrables se doublent de multiples combinaisons. Cette particularité linguistique du Paraguay est déjà apparue à travers l'histoire sportive, notamment en Copa America, que l'Albirroja n'a remportée qu'à deux reprises (1953 et 1979). Mais cette barrière de la langue s'est parfois faite sentir au sein même de la sélection. L'attaquant Lucas Barrios et les milieux Jonathan Santana et Nestor Ortigoza, tous d'origine argentine, ont subi les moqueries de leurs équipiers et ont dû apprendre le guarani. Mais l'Espagne n'est pas en reste. Sa colonie catalane, en force dans la sélection avec six joueurs, pourra toujours parler sa langue pour dérouter l'adversaire. Et pour ces deux nations qui n'ont jamais atteint les demi-finales d'u Mondial, le mot perdre – « perdre » en catalan, « hundi » en guarani – est banni.