Le gouvernement algérien a réitéré hier « solennellement » sa position « constante et bien connue » concernant les relations algéro-marocaines, l'édification unitaire maghrébine et le règlement de la question du Sahara-Occidental. Reproduite dans une longue « déclaration du ministère des Affaires étrangères sur le Sahara-Occidental », cette position a pour finalité de lever « l'amalgame malencontreux et fallacieux entre les relations bilatérales algéro-marocaines, l'édification unitaire maghrébine et le règlement de la question du Sahara-Occidental » induit par « des déclarations de certaines personnalités gouvernementales étrangères relatives » à cette question. Sans identifier ces personnalités, le ministère des Affaires étrangères (MAE) ajoute dans sa déclaration que la décision de l'Algérie de réaffirmer sa position sur ces trois dossiers tient d'un « esprit de responsabilité envers tous les peuples de la région comme à l'égard de la communauté internationale dans son ensemble ». Il est possible de supposer que la mise au point du MAE s'adresse à des personnalités appartenant aux gouvernements espagnol, français et marocain. L'hypothèse reste probable d'autant que la déclaration du département de Abdelaziz Belkhadem intervient à la suite d'une offensive soutenue de Paris et Madrid sur le dossier sahraoui. Ces deux capitales n'ont cessé de multiplier, ces dernières semaines, les pressions sur Alger pour l'amener à renoncer à ces positions traditionnelles sur le Sahara-Occidental et à accepter le principe d'« un dialogue direct » avec son voisin marocain comme voie de règlement à ce conflit. Un dialogue conduit sous leurs auspices et qui plus est ne ferait pas cas du « plan Baker » et des résolutions de l'ONU. Si le raccourci, pris par Madrid et Paris, consistant à réduire le conflit du Sahara-Occidental à un simple problème entre l'Algérie et le Maroc a déjà de quoi étonner, l'idée rendant tributaire la construction du Maghreb et l'approfondissement des relations algéro-marocaines, défendue par Michel Barnier et José Luis Zapatero, lors de leur visite à Alger, est la goutte qui a, apparemment, fait déborder le vase. Intéressé par une reprise à zéro du dossier sahraoui, le Maroc joue à fond la carte de Madrid et de Paris. Rabat multiplie, ces derniers jours, les sorties médiatiques pour sonder la position des autorités algériennes concernant la « solution politique » au problème du Sahara-Occidental préconisée par les gouvernements espagnol et français. Pour faire croire qu'Alger a accepté la solution franco-espagnole, les autorités marocaines ont laissé courir la rumeur que la visite de leur ministre de l'Intérieur allait également aborder ce dossier. Ce qui a visiblement motivé la réaction d'Alger. La déclaration du MAE ne souffre aucune équivoque puisqu'elle réaffirme, concernant le conflit sahraoui, « l'attachement indéfectible de l'Algérie à la légalité africaine et internationale ». A ce titre, il est rappelé que le conflit du Sahara-Occidental est « une question de décolonisation à parachever sur la base du droit imprescriptible des peuples à disposer d'eux-mêmes à travers la mise en œuvre scrupuleuse et diligente du plan Baker et de paix pour l'autodétermination du peuple du Sahara-Occidental qui a été adopté à l'unanimité par le Conseil de sécurité des Nations unies ». Et d'ajouter à l'adresse du « peuple marocain frère » que « ce n'est qu'avec les autorités dirigeantes du Front Polisario que la paix se fera et (que) la recherche d'un interlocuteur de substitution, en l'occurrence l'Algérie, ne conduit qu'à l'impasse et ne fait que prolonger indûment une situation préjudiciable aux peuples de la région ». Une question de légalité Clarification faite, le MAE porte à l'intention du Maroc et du Front Polisario que « l'Algérie demeure pleinement disponible pour apporter sa contribution, dans les limites de son statut de pays voisin du territoire du Sahara-Occidental et de partie intéressée par le processus conduit par les Nations unies, à une dynamique authentique de paix ». Et l'Algérie, mentionne en outre le département de Belkhadem dans sa déclaration, « veut croire que les deux parties assumeront leurs responsabilités primordiales et historiques en se retrouvant dans une vision généreuse du destin commun de tous les peuples maghrébins autour des valeurs d'égalité, de solidarité, de démocratie et d'unité ». S'agissant des relations algéro-marocaines, le MAE précise que « l'Algérie ne subordonne l'approfondissement et le développement de ses relations de fraternité, de bon voisinage et de coopération avec le royaume du Maroc à aucune conditionnalité ni restriction ». Celle-ci, indique-t-on, « est disponible pour la prise de mesures et d'initiatives concertées dans un cadre de réciprocité et de sérieux dans la mise en œuvre des accords conclus pour donner à ces relations l'impulsion et la consistance qu'elles méritent pour être hissées au diapason des aspirations des peuples algérien et marocain ». Le MAE souligne le principe selon lequel « l'Algérie considère que le développement des relations algéro-marocaines et l'accélération de la construction unitaire maghrébine ont naturellement la vocation de contribuer à la création d'un climat politique favorable à l'avènement progressif d'une ère qualitativement nouvelle à l'échelle de la région maghrébine ». « C'est d'ailleurs cette conviction et cette attente qui ont été solidairement invoquées au moment du rétablissement des relations diplomatiques entre l'Algérie et le Maroc, ainsi que de la fondation de l'Union du Maghreb arabe (UMA), alors même que le conflit du Sahara-Occidental était encore dans une phase de confrontation militaire active entre le royaume du Maroc et le Front Polisario », ajoute-t-on. Cette situation amène Alger à réaffirmer que « nul n'est à présent fondé à soutenir que les relations algéro-marocaines et la relance de l'Union du Maghreb arabe seraient tributaires du règlement de la question du Sahara-Occidental et, encore moins, d'une forme unilatéralement fixée dudit règlement ». Et à l'occasion, le MAE n'a également pas omis de mettre en avant la foi inébranlable de l'Algérie dans l'idéal maghrébin, ainsi que son ferme engagement en faveur de la dynamisation de l'UMA.