Les regards sont une nouvelle fois braqués sur le Conseil de la nation. Cette chambre parlementaire, qui n'a ni les prérogatives d'amender ni de faire des propositions de lois, est aujourd'hui au cœur d'une nouvelle crise en raison du refus de Salah Goudjil, qui assure l'intérim de la présidence depuis le mois d'avril 2019, de quitter le perchoir et d'organiser des élections. Un vote qui permettra d'élire le deuxième personnage de l'Etat en remplacement de Abdelkader Bensalah, qui a mis fin à son mandat à la tête de cette institution parlementaire le 29 décembre 2019. Depuis cette date, le poste est resté légalement vacant. Salah Goudjil, ce cacique du FLN, ne veut pas lâcher les arcanes du pouvoir et les sénateurs, qui l'accusent d'outrepasser les lois, sollicitent l'intervention du président Tebboune. «Au nom de la nouvelle République rêvée par les Algériens, j'en appelle au président de la République, garant de la Constitution. Il doit mettre fin à cette mascarade.» Selon le rapporteur de la commission des affaires juridiques, Fouad Boussetta, une réunion des membres du bureau devrait se tenir et annoncer officiellement la vacance de ce poste et une autre devrait avoir lieu entre les présidents des groupes parlementaires qui transmettront, eux aussi, le dossier à la commission des affaires juridiques qui, à son tour, annoncera la date de la tenue d'une séance plénière. Et selon les articles 5 et 6 du règlement intérieur, les délais sont fixés à 15 jours à compter de la date de la tenue de la séance au cours de laquelle l'on décrète la vacance de ce poste, selon les articles 5 et 6 du règlement intérieur. Or, Salah Goudjil, âgé de 90 ans, n'a, jusqu'ici, entrepris aucune action pour organiser la succession de Bensalah. Bien au contraire, au lieu de programmer une plénière pour élire le nouveau président du Sénat, Goudjil a réuni les membres du bureau élargi aux présidents des groupes parlementaires pour débattre du rôle que doit assumer le Sénat durant la prochaine étape, à commencer par le débat sur le plan d'action du gouvernement et l'amendement de la Constitution. «Nous sommes le législateur et l'unique légiférant. Malheureusement, nous sommes les premiers à transgresser les lois et de surcroît dans cette nouvelle République que prône le président Tebboune. L'administration du Sénat a prolongé la présidence de Goudjil en violation de la loi», s'insurge le sénateur FLN, Abdelwahab Benzaïm, candidat à la candidature pour la présidence du Conseil, et Mahmoud Kissari qui, lui aussi, avait affiché son intention de se porter candidat. Pour beaucoup de sénateurs, Goudjil, qui avait été choisi, en sa qualité de doyen des sénateurs, pour prendre l'intérim à la tête de la deuxième Chambre du Parlement, est un «assoiffé du pouvoir». Benzaim accuse ouvertement Aïssa Bouragba, chef de cabinet du Sénat, de «manœuvrer» pour maintenir Salah Goudjil, «vieux et malade», à la tête de l'institution parlementaire. Contacté, Salah Goudjil accuse à son tour ses détracteurs de vouloir occuper le sommet de la hiérarchie. «Je suis le président de cette institution et ceux qui crient au scandale ambitionnent de devenir le deuxième personnage de l'Etat», dit-il. Face à cette crise, la question portant sur l'utilité de cette institution est revenue au-devant de la scène. Beaucoup s'interrogent sur le devenir de cette institution parlementaire. Sera-t-elle dissoute ? Ou bénéficiera-t-elle de plus de prérogatives ? Pour l'heure, elle est secouée par une crise.