A peine de retour d'une mission de trois ans comme ambassadeur au Sénégal, Jean-Christophe Rufin, écrivain et académicien de son état, vient de dénoncer un retour des « vieux travers » de la politique africaine de la France. Pour les Algériens, l'un des travers est bien perçu dans le cas des visas refusés sans motivation. Ou plutôt refusés « en raison du risque de détournement de l'objet du visa, soit pour rester illégalement en France, soit pour profiter indûment de prestations médicales », comme l'a argumenté publiquement, avant-hier, Michel Dejaegher, nouveau consul général à Alger. Aujourd'hui, 14 juillet, fête nationale, Sarkozy ne manquera pas de tenir un discours conciliant en direction des « ex-colonies », mais difficilement détaché des « vieux travers ». De plus en plus, la déception est grandissante chez les Algériens vis-à-vis de « l'ennemi d'hier, l'ami d'aujourd'hui ». Ils assistent à une politique française difficilement constante et obéissant souvent à des sautes d'humeur. Une déclaration comme celle d'un Bernard Kouchner, en février dernier, ou bien l'inscription de l'Algérie sur la liste de pays à risque pour les transports aériens le confirment bien. En lieu et place des choses dites ou des décisions déjà prises, Paris multiplie alors l'envoi d'officiels, donnant l'impression que les Algériens sont impulsifs et réagissent par émotion. Récemment, Claude Guéant, secrétaire général de l'Elysée et homme de confiance de Sarkozy, est venu à Alger pour apaiser les esprits. Mais d'ici quelque temps et une fois encore, rien n'est garanti quant à une action de l'Etat français qui ira fâcher l'Algérie. A l'esprit paternaliste qui a prévalu pendant des dizaines d'années après l'indépendance, la France a substitué l'esprit de maître qui se permet de gueuler (Kouchner), de sanctionner (liste des pays à risque) ou d'agir comme bon lui semble (loi sur la glorification de la présence coloniale). Tout cela en faisant fi d'un passé historique que, malheureusement, certaines personnalités françaises ont du mal à assumer, d'un présent qui a scellé le sort de milliers de Franco-Algériens unis par des liens de sang et d'un avenir commun que Paris a intérêt à construire avec Alger, loin de tout esprit revanchard ou passéiste. La fête du 14 juillet devrait servir à se ressourcer dans les véritables valeurs d'une France qui ne doit plus aller de travers avec ses partenaires.