Comment contrer l'extrémisme islamiste sans dire toucher à l'islam ? Le pouvoir français annonce des lignes rouges. Il n'y aura plus aucun imam dépêché par les principaux pays d'origine des musulmans de France : Algérie, Maroc, Turquie. Actuellement, ils sont 300 (150 pour l'Algérie), renouvelés régulièrement (pour quelque 2500 lieux de culte). Ils sont détachés et payés par leur Etat. Il n'y aura pas non plus de «psalmodieurs» détachés pour la période du Ramadhan. En outre, il n'y aura également plus d'enseignants de langue arabe venus de ces pays pour les écoles dans le dispositif européen Enseignement de langue et de culture d'origine (ELCO) qui concerne aussi des pays non musulmans comme la Croatie, l'Espagne, l'Italie, le Portugal, la Serbie. Un nouveau dispositif, déjà étudié sous la présidence Hollande, sera mis en place. Pour l'instant, Elco ne touche que 80 000 élèves par an ! Mais est-ce là un nid d'islamisme ? Un syndicaliste sur France info relativise : «Les enseignants Elco reçoivent un agrément de l'Education nationale, sont membres de l'équipe pédagogique et (…) le directeur d'école doit s'assurer que les enseignements Elco entrent dans le cadre du socle commun.» Ces mesures censées contrecarrer l'islamisme ont été annoncées la semaine dernière dans un quartier de Mulhouse par le président Emmanuel Macron. Il inaugurait là une nouvelle phase de son quinquennat sous le signe fort que «l'islam politique n'a pas sa place» en France. Pourtant, a-t-il indiqué, «faire un plan contre l'islam serait une faute profonde (…) il ne s'agit pas de stigmatiser quelque religion.» Le CFCM renforcé comme représentant de l'islam de France Le Président français a cependant repris à son compte des termes qui courent dans les médias depuis quelques années sans qu'on connaisse réellement l'ampleur de ces phénomènes : «Dans la République, on ne peut pas accepter qu'on refuse de serrer la main à une femme parce qu'elle est femme ; dans la République, on ne peut pas accepter que quelqu'un refuse d'être soigné ou éduqué par quelqu'un ; dans la République, on ne peut pas accepter la déscolarisation ; dans la République, on ne peut pas exiger des certificats de virginité pour se marier ; dans la République, on ne doit jamais accepter que les lois de la religion puissent être supérieures aux lois de la République, c'est aussi simple que ça.» Dans sa volonté de ne pas stigmatiser les populations immigrées de culture musulmane, le président Macron a préféré employer le terme de séparatisme. Le ministre de l'Intérieur chargé des cultes, Christophe Castaner, a précisé les contours de ce mot dans un entretien accordé au quotidien La Provence : «Le séparatisme islamiste, c'est le rejet de nos lois, le refus de nos valeurs, la haine de la République. C'est l'affirmation que la loi de Dieu serait supérieure à celle de la République. Il est, hélas, souvent le fruit d'un échec, quand la République a manqué à sa mission de protection de tous. Le séparatisme est un péril : nous le combattrons de toutes nos forces.» Contre ce fléau, le gouvernement français entend mettre à contribution le Conseil français du culte musulman (CFCM), renforcé dans son rôle initial (jamais réellement assumé pleinement !) de représentant actif de «l'islam de France». Il devra notamment se charger de la formation d'imams «made in France» et proposer un plan d'action. Malgré les échecs passés et en dépit du peu de représentativité effective de son institution dans la diversité inextricable des associations et fédérations musulmanes, l'actuel président du CFCM pour deux ans, le Marocain Mohamed Moussaoui, croit pouvoir écrire dans une contribution au Monde qu'il est «d'une nécessité absolue que la République reconquière ces territoires pour le bien de tous les citoyens, à commencer par les musulmans qui sont les premières victimes de ce séparatisme. Les institutions religieuses doivent promouvoir les valeurs communes, à même de prévenir toute séparation ou division dans notre société».