Eu égard au nombre de campagnes de sensibilisation et à la gravité de la situation sanitaire actuelle, beaucoup de choses restent à faire en matière de mesures d'hygiène. Les Algériens sont-ils capables de faire preuve de conscience par rapport aux mesures d'hygiène pour contrer la propagation du coronavirus ? Vu le nombre important de campagnes de sensibilisation et la gravité de la situation sanitaire actuelle, on serait tenté de répondre par l'affirmative. Toutefois, un tour dans les marchés de proximité de la capitale nous prouve le contraire. Il est 11h au marché couvert de Birkhadem. En y accédant, on se croirait même que l'épidémie du Covid-19 est terminée tant il y a du monde. Rares sont les personnes portant des bavettes de protection ou des gants. Aucun respect de la distanciation sociale, règle élémentaire pour la réduction des risques de contamination. En plus des clients sans protection, l'attitude du marchand de sardines nous laisse sans voix. D'une façon pas très hygiénique, il sert à mains nues à un client sa demande avant d'aller chercher la monnaie dans un sachet de fortune après s'être gratté la tête et essuyé les mains sur son T-shirt. A quelques pas de cette scène, un vendeur de fruits portant des gants en latex donne une tape dans le dos de son voisin, vendeur d'olives, avant de servir des fraises à une cliente. Si le problème ne se pose pas pour les produits non destinés à la consommation directe sans cuisson, la question de l'hygiène est plus que nécessaire dans les boulangeries. Un produit vendu dans la majorité des cas par une seule personne placée au comptoir chargée de l'opération de vente et de distribution. Les gants portés par certains sont, selon les experts, des nids àmicrobes et autres germes pouvant causer des maladies, dont le coronavirus. Cette inconscience est finalement la règle générale dans la majorité des marchés de proximité et de gros de la capitale, voire du pays. El Hadj Tahar Boulenouar, président de l'Association nationale des commerçants et artisans (ANCA) déclare avoir notifié à maintes reprises les commerçants afin de désinfecter les lieux de vente et de respecter un minimum de mesures d'hygiène dans les transactions commerciales. «Si le problème ne se pose pas avec acuité dans les petits commerces ou les supérettes, dans les marchés de gros et surtout de détail, l'affaire est difficile à gérer. Fermer ces lieux, notamment les marchés de proximité, risquerait d'induire une pénurie et une crise dans l'approvisionnement du marché. Nous avons proposé aux collectivités locales d'instaurer un système d'entrée et de sortie afin d'assurer une meilleure fluidité dans ces espaces. Nous avons également proposé de réduire le temps d'ouverture des marchés et d'imposer leur fermeture vers midi. Nous avons aussi appelé ces responsables à opérer des désinfections et autres opérations de nettoyage au quotidien avant la réouverture de ces lieux le lendemain», déclare notre interlocuteur, qui reconnaît le manque de conscience de certains commerçants, mais qui pointe du doigt le consommateur. Selon lui, le client a une grande part de responsabilité dans la prévention du Covid-19, notamment en évitant de se balader dans ces espaces commerciaux sans raison, en respectant la distanciation et en évitant les bousculades et les ruées. En réponse à ces propos, le Dr Mustapha Zebdi, président de l'Association de protection du consommateur (Apoce), appelle les commerçants à faire preuve de responsabilité et d'un minimum de conscience par rapport aux facteurs de risques. «Certe,s la responsabilité est partagée, mais il est inconcevable qu'un commerçant porte des gants toute la journée pour servir des produits alimentaires, encaisser et rendre la monnaie. De plus, dans un commerce, c'est au propriétaire d'instaurer des règles. Le client ne pourra que s'y plier», s'insurge-t-il. Responsabilité à parts égales : la protection et la prévention de cette pandémie est, certes, du ressort du consommateur appelé à respecter les mesures de confinement, mais aussi du côté du commerçant et des autorités du pays. Une chose est sûre : cette situation sanitaire est la meilleure occasion pour instaurer de nouvelles règles et une meilleure organisation de ces espaces destinés à recevoir un large public.