La question du caractère d'écriture de tamazight relance toujours le débat aussi bien chez les enseignants de cette langue que chez les linguistes. Amar Laoufi, enseignant-chercheur à l'université Akli Mohand Oulhadj de Bouira, estime qu'il y a une réalité de terrain qu'on ne doit pas nier si on veut unifier le caractère de la transcription de tamazight, et ce, nous a-t-il expliqué, tout en tenant compte de l'expérience de l'enseignement de la langue en question depuis son introduction dans le système éducatif en 1995. «Aujourd'hui, 25 ans après, pratiquement tout l'enseignement se fait en caractère latin dans les régions où cet enseignement est sérieusement pris en charge. Le HCA (Haut commissariat à l'amazighité) a tout fait pour relancer le débat sur la polygraphie tandis que la même institution avait déjà tranché sur la question de la transcription, il y a plus de 18 ans, à l'issue d'un colloque intitulé «Tamazight face au défi de la modernité» qui s'est tenu à Boumerdès. La question refait surface dans les milieux politiques et même idéologiques», a souligné le même universitaire qui ajoute, en outre, que les Touaregs enseignent en tifinagh, notamment à Tamanrasset, mais tout en sachant que cette transcription n'est pas aménagée et codifiée. «Les Touaregs considèrent le tifinagh comme patrimoine culturel de la région», nous a-t-il confié. Le même enseignant-chercheur précise également que «la non obligation de l'enseignement de tamazight a laissé aussi libre court à «l'intrusion» du caractère arabe qui n'est pas aussi codifié et aménagé pour cet enseignement. Je veux juste préciser que la question d'unification de la transcription de tamazight est une illusion, car la langue est diversifiée et tamazight est une famille de langues. Aujourd'hui, elle se conjugue au pluriel. Donc, une unification, à l'exemple de l'arabe classique est un suicide pour toutes les variantes linguistiques vivantes de cette langue. Toute unification en dehors des laboratoires et instituts spécialisés (composés de spécialistes et scientifiques reconnus dans le domaine amazigh) est de la poudre aux yeux», soutient M. Laoufi qui ajoute aussi que l'académie algérienne de la langue amazighe qui doit travailler pour la promotion de cette langue n'existe que sur papier. «D'ailleurs, elle n'a même pas de siège. Cela explique qu'il n'y a pas de volonté politique pour régler la question de la promotion de tamazight», souligne-t-il. Par ailleurs, rappelons que la graphie de tamazight avait été abordée aussi l'année dernière, lors d'un colloque sous le thème : «La réalité de l'enseignement de tamazight en Algérie, la démarche à suivre pour prendre en compte le plurilinguisme intra et extra-dialectal, quelle incidence du statut de langue nationale et officielle de la langue amazighe sur les méthodes d'enseignement, ses manuels et les défis auxquels elle fait face», organisé par le Centre national pédagogique et linguistique pour l'enseignement de tamazight (CNPLET), en collaboration avec la faculté des lettres et langues de Tizi Ouzou. «La langue amazighe passe progressivement de son statut de langue atomisée en plusieurs variétés, parlers et sous-parlers vers la standardisation», avait fait remarquer Professeur Moussa Imarazene, enseignant au département de langue et culture amazigh de l'université Mouloud Mammeri.