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Théâtre
Les Confessions d'un musulman de mauvaise foi
Publié dans El Watan le 04 - 04 - 2005

Les Confessions d'un musulman de mauvaise foi est une pièce de théâtre écrite et mise en scène par Slimane Benaïssa. La pièce a été créée le 6 novembre 2004 au Théâtre des Bergeries à Noisy-le-Sec le 6 novembre 2004.
Elle a été jouée pendant 15 jours en Belgique, elle tourne actuellement dans plusieurs villes de France, elle sera jouée la première quinzaine de mai à Montréal, et la seconde quinzaine à Genève, au théâtre Saint-Gervais et tout le mois de juillet au Festival d'Avignon. Dans cette pièce, Slimane Benaïssa raconte avec humour le parcours initiatique d'un jeune musulman. La pièce a pour cadre l'Algérie, temporellement elle est située entre l'époque coloniale et les années de violence intégriste. Slimane Benaïssa tient les rôles du père et du maître coranique. Pour les autres rôles, les enfants jumeaux Karim et Karima, leur mère, l'instituteur français de l'école coloniale, l'institutrice française venue en coopération au lendemain de l'indépendance, il a choisi des acteurs « éloignés de la culture arabe et musulmane » parce qu'ils ont « la sensibilité nécessaire pour transmettre la complexité de cette culture. Toutes les explications que je donne aux acteurs sont des explications en moins à donner au public », un public essentiellement français, de tous âges. « C'est cela l'universalité ; Pourquoi des rôles de musulmans devraient-ils être interprétés obligatoirement par des comédiens musulmans ? », s'interroge Slimane Benaïssa. « J'ai choisi le rire. Le personnage Karim (le fils) est en conflit avec les interdits de sa religion. C'est un individu qui s'empêtre dans ses contradictions. » « La transgression des interdits est une problématique qui se pose à toutes les religions », nous affirme Slimane Benaïssa. Même si elle s'adresse à un très large public, cette pièce touche en particulier les adolescents confrontés à la problématique de leur relation à Dieu et à leurs angoisses métaphysiques. C'est une réflexion sur le pourquoi des interdits et sur les mécanismes de la transgression consciente. Karim deviendra laïque, républicain et athée, « non par haine de Dieu, ni par dégoût de la religion, mais parce qu'il comprend, à travers sa propre histoire, faite de colonialisme, de dictature et d'intégrisme, que ce sont les hommes qui commettent les injustices et que Dieu n'y peut rien et se tait ».
Extrait
Karim : « Sidi, pourquoi ammi Salah a-t-il épousé une deuxième femme ? »
Le cheikh : « Parce qu'en Islam, les hommes ont droit à quatre femmes. »
Karim : « Sidi ! Les femmes, elles ont droit à quatre hommes ? »
Le cheikh : « Y a pas à dire, tu es monté à l'envers. C'est déjà compliqué pour les hommes d'avoir quatre femmes... »
Karim : « Sidi ! Pourquoi le curé marche en se regardant dans un miroir ? »
Le cheikh : « Pour ne pas regarder le ciel. Car les chrétiens, une fois l'an, boudent la lune qui est aux Arabes. Parce que nous, nous avons un calendrier lunaire et eux, un calendrier solaire. »
Karim : « Alors, sidi, nous, on compte les nuits et eux les jours ? »
Le cheikh : « Yakhlouqou Allah ma yacha ! (Dieu crée ce qu'il veut) »
Karim : « Sidi, pourquoi tous les Français partent-ils ? »
Le cheikh : « Comme ils sont venus un jour, ils partiront un jour. C'est ça l'indépendance. »
Karim : « Alors, sidi, l'indépendance, c'est quand on reste tout seul ! »
Le cheikh : « Et tous tes frères, ils ne suffisent pas ? »
Karim : « Maman ! Pourquoi ammi Salah a-t-il épousé une deuxième femme ? »
La mère : « Parce que nous, les femmes, selon le compte des hommes, nous valons un quart d'homme. C'est pour cela que les hommes peuvent épouser quatre femmes. »
Karima : « Nous, les femmes, on a droit à quatre hommes ? »
La mère : « Un homme c'est déjà les emmerdements de quatre ! Donc en épousant un homme, c'est comme si tu en avais épousé quatre. »
Karima : « C'est Dieu qui le dit ou c'est toi ? »
La mère : « Mais Dieu ne va pas nous autoriser à épouser seize emmerdements en même temps. Il est Dieu et Il sait ce qu'Il fait... Quand même ! »
Karim : « Maman ! Pourquoi le curé marche en se regardant dans un miroir ? »
La mère : « Parce que les Français adorent se regarder. C'est pour ça qu'ils ne voient pas dans quel état nous sommes. Le jour où le miroir se cassera, tu verras le malheur que ça sera. »
Karim : « Maman, c'est vrai que l'indépendance, c'est quand tous les Français partiront ? »
La mère : « La plus belle des indépendances, c'est celle qui ne fera partir personne ! Et maintenant foutez-moi la paix ! »


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