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M. Mahmoud Mendil. Directeur général de l'Institut technique de l'arboriculture fruitière (ITAF) : « Il faut aller vers la création de nouveaux terroirs »
Des régions précises du pays sont connues pour leur prédilection à la production de certaines variétés de fruits (cerises, figues, oranges..). Ces fiefs sont pour la plupart à l'abandon... Notre pays dispose effectivement d'un nombre appréciable de terroirs qui sont caractérisés, aussi bien par une production agricole (fruits, légumes, miel, etc.) ou par des préparations de spécialités d'origines agricole ou agroalimentaire (couscous, r'fisses, chakhchoukha, fruits et légumes secs, etc.). Ces terroirs paraissent abandonnés. En réalité, il faut comprendre que c'est plutôt l'espace ou l'aire du terroir qui a rétréci pour des raisons parfois communes (exode rural, urbanisation, diversification des activités et multiplication des activités spéculatives à court terme), parfois spécifiques à un terroir. Le dépérissement du cerisier par attaque de parasites tels que le Capnode, et dans ce cas précis la diminution de la superficie du cerisier, n'a pas tant pour cause le parasite, mais des bouleversements socio-économiques ayant entraîné le délaissement de la culture la rendant plus fragile aux attaques. En tout état de cause, tous les terroirs persistent et subsistent, ce qui a permis de les intégrer dans le programme de renouveau rural élaboré par le ministère de l'Agriculture et du développement rural (MADR) comme un maillon essentiel dans la diversification économique et l'amélioration des revenus des populations rurales. Ces fiefs fruitiers sont aussi le siège d'un savoir-faire cumulé à travers les générations, et il se trouve que la déperdition a aussi touché cet aspect des choses… Là aussi, le constat est réel en partie. Sur une période de dix à quinze ans, nous avons constaté un vieillissement de la population agricole et un faible renouvellement de cette même population dû aux raisons citées plus haut. La déperdition a touché les métiers agricoles (tailleurs, greffeurs, etc.) mais pas le savoir-faire en tant que processus de production spécifique à un ou à plusieurs terroirs. La relance de l'activité agricole a permis de libérer des initiatives, ce qui donne lieu, aujourd'hui, à la relance d'activités telles que la production de cerises, figues sèches, les huiles essentielles, les arômes, etc. Les processus de production à la base de ces savoir-faire étaient transmis par voie orale et de manière empirique, ce qui a, paradoxalement, permis leur persistance, mais aujourd'hui le renouvellement de la population agricole et sa prise en charge, dans le cadre du programme de renforcement des capacités humaines et de l'appui technique, initié par le ministère de l'Agriculture et du développement rural, a permis de transcrire ces savoir-faire et de les codifier pour en faire des moyens d'émancipation aussi bien sociale, culturelle qu'économique des populations agricoles et rurales. Que peut préconiser un institut comme le vôtre pour réhabiliter et promouvoir ces fiefs, en créer d'autres sur le terme, pourquoi pas ? A l'Institut technique de l'arboriculture fruitière et de la vigne, et en droite ligne des programmes de renouveau rural pour assurer la sécurité alimentaire de la nation, nous développons dans ce contexte de valorisation des savoir-faire et des terroirs, deux axes : Le premier consiste en l'appui technique à la redynamisation et au développement des terroirs existants, et à ce niveau, les produits sont nombreux à savoir : l'huile d'olive, l'olive de table, la figue sèche, la figue fraîche, l'abricot sec, les produits de la vigne, la cerise, etc. Les terroirs sont aussi nombreux que les produits et les espaces qui les caractérisent. Le deuxième axe a pour but de développer de nouveaux terroirs et de nouveaux produits (spécialités agricoles et agro-alimentaires nouvelles, agriculture biologique, etc.). Et à ce niveau-là, dans le cadre de cette nouvelle stratégie, c'est un bouleversement de la géographie agricole de notre pays qui est en train de s'opérer et de se dessiner pour une utilisation rationnelle des espèces naturelles. Ce qui est valable pour l'arboriculture et la viticulture est valable pour tous les produits agricoles frais et transformés ou les préparations agroalimentaires. Il s'agit d'axer aujourd'hui sur les points forts de l'agriculture et sur les potentialités de notre territoire pour en tirer un maximum de plus-value. Nous sommes dans une phase de mise en place des moyens, scientifiques, technologiques, techniques et réglementaires pour réussir cette mutation d'une agriculture de produits frais à une agriculture qui offre des possibilités de diversification et de valorisation des produits de la terre et de valorisation du savoir-faire de l'homme. Nous lançons un appel à tous les opérateurs, à titre individuel ou collectif, pour nous contacter et adhérer à cette démarche aussi bien pour la réhabilitation que pour le développement et la création de nouveaux terroirs et de nouveaux labels.