La déferlante de textiles chinois sur les marchés européen et américain commencent à prendre une tournure à la limite de l'incident diplomatique. Face aux menaces des Occidentaux d'avoir recours à des mesures de sauvegarde pour limiter les importations chinoises en matière de textiles, Pékin a décidé de nommer un négociateur spécial pour, indique l'agence Chine Nouvelle, gérer un nombre croissant de plaintes internationales sur ces exportations de textiles et autres contentieux commerciaux. Gao Hucheng, vice-ministre du Commerce, qui a reçu ce titre de négociateur commercial international et sera le représentant spécial de la Chine dans les grandes négociations commerciales, aura donc la tâche difficile de calmer le jeu et de défendre les intérêts de son pays. Les Chinois prennent très au sérieux le courroux des Etats-Unis et de l'Union européenne qui l'accusent de participer à l'émiettement de leurs industries respectives du textile déjà en crise. Une situation aggravée par la suppression des quotas en début janvier. Mais devant les proportions alarmantes que prend l'envahissement des marchés américain et européen par le textile chinois, les USA et l'UE ne se sont pas encombrés de subtilité diplomatique pour entamer officiellement la semaine dernière des procédures visant à limiter les importations de vêtements et tissus fabriqués en Chine, à la demande de leurs producteurs menacés de disparition. Le gouvernement américain est allé encore plus loin en annonçant, vendredi dernier, avoir placé la Chine sur une liste noire spéciale des pays à surveiller en matière de contrefaçons. Washington a donc haussé le ton ces derniers jours envers la Chine. Cette dernière serait responsable de plus du quart du déficit commercial américain. Le gouvernement américain a également rejoint la commission européenne en lançant une procédure ouvrant la voie à une éventuelle réintroduction de quotas pour limiter les importations textiles de Chine. La suppression des quotas, début janvier, a pris de court les opérateurs du textile du monde entier qui se sont retrouvés du jour au lendemain face à une concurrence chinoise féroce. Les producteurs américains, qui avaient eu près de 10 ans pour se préparer, n'ont cessé de sonner le glas depuis cette date. Les répercussions sur l'emploi n'ont pas tardé à se faire sentir et le déficit, déjà important, risque de se creuser davantage. En 2004, le déficit commercial des Etats-Unis avec la Chine a atteint 162 milliards de dollars, et en mars dernier les usines textiles américaines comptaient 14 000 emplois de moins qu'un an plus tôt, selon les chiffres officiels. « Il y a eu une déferlante d'importations (en provenance de Chine) et ça a fait des dégâts », a déploré David Trumbull, un responsable de la National Textile Association, l'une des grandes fédérations de producteurs américains. Pékin a rappelé être « fermement opposé aux limitations imposées » par l'étranger. Mais le gouvernement chinois préfère éviter une éventuelle guerre commerciale. Lors de la négociation de l'accession de la Chine à l'OMC, qui a rejoint cette organisation le 1er janvier 2002, les partenaires commerciaux de Pékin s'étaient réservé le droit de recours à des mesures spéciales de sauvegarde pour limiter provisoirement la croissance des importations de certains produits en provenance de ce pays à 7,5% par rapport au niveau de l'année précédente. Or pour certaines catégories, tels les chemises et pantalons en coton et fibres synthétiques, les importations ont bondi de plus de 1000% lors du premier trimestre 2005.