Le dernier rapport de l'Institut international de la presse (IPI), dans le dernier numéro de sa revue, fait un constat sévère quant à la situation de la liberté d'expression en Algérie pour l'année 2004.« Le cercle atroce des violations d'expression se poursuit, alors que le pays se préparait aux élections présidentielles », rapporte l'IPI dont le siège est à Vienne (Autriche). Cette sentence pour le moins sévère est soutenue par plus de deux pages d'explications détaillées sur l'état de la presse algérienne durant l'année dernière. Comme entrée en la matière et par ordre chronologique, le rapport revient sur le contrôle des publications étrangères : l'hebdomadaire Jeune Afrique-l'Intelligent du 8 au 14 février 2004 n'avait pas franchi le seuil des kiosques à cause d'un article qui se penchait de près sur le rôle de l'armée dans l'histoire de l'Algérie. L'écrit enchaîne sur l'affaire Benchicou et son livre qui avait soulevé l'ire des autorités durant la même semaine. Résultat : fouille des locaux du Matin et examen des journalistes qui possédaient une copie de Bouteflika, une imposture algérienne, livre dont plusieurs copies avaient été saisies. 20 février, les imams s'y mettent aussi. Le rapport de l'IPI évoque la campagne contre la presse indépendante via de nombreux prêches dans différentes villes du pays. Pour rappel, des imams avaient accusé les journalistes d'avoir « une attitude hostile envers l'Islam », d'être « une source de conflit » pour le pays et de mener la nation musulmane vers « la perte morale ». Un autre aspect abordé, celui du contrôle des accréditations de correspondants algériens travaillant pour la presse étrangère. Des témoignages étayant ces faits expliquent, entre autres, qu'une telle attitude ne fait qu'encourager les correspondants à travailler sous pseudonymes. Cela se passait à quelques semaines de la présidentielle. 5 mars 2004 : le Matin est sommé de payer ses dettes en un délai de 24 heures, sous peine de suspension et de fermeture des locaux. Ce qui ne tardera pas à arriver en juin de cette même année. Le rapport poursuit le classement des violations des droits d'expression en abordant la question du harcèlement et de l'emprisonnement de correspondants locaux. Dont Hassan Bourras d'El Djazaïri à El Bayadh, condamné pour diffamation, à deux ans de prison ferme et interdit d'écrire durant cinq ans ; Hafnaoui Ghoul (correspondant d'El Youm à Djelfa) également condamné pour diffamation à six mois de prison ferme. Et le cas Benchicou qui a été condamné à deux ans de prison ferme. Le 21 juin, les locaux du Matin sont fermés. De nombreux autres cas sont cités avec force détails. Le rapport se termine de cette manière : « Jusque-là, plus de 100 cas de diffamation sont en suspens, la plupart portés en justice par différents ministères contre des journaux critiques à l'administration Bouteflika. » La revue annuelle du IPI examine la situation des médias dans plus de 184 pays, territoires et secteurs administrés, rapportant des violations de la liberté d'expression et les développements principaux de médias dans le monde entier. Divisé en régions spécifiques, chaque rapport fournit une vue d'ensemble complète des événements de l'année et peut être comparé aux événements des années précédentes.