Cultivées jadis exclusivement sur le continent américain, les feuilles de tabac le sont aujourd'hui dans plus d'une centaine de pays à travers le monde, dont 80% dans le monde en développement et 70% dans six pays : la Chine, le Brésil, l'Inde, l'Indonésie, les Etats-Unis et le Zimbabwe. En dépit de ses effets nocifs sur la santé des consommateurs, la consommation mondiale du tabac a connu une progression annuelle d'environ 1,8%, passant de 3,57 millions de tonnes produites en 1961 à près de 6,2 millions de tonnes en 2003, selon les données statistiques de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Cette progression importante a toutefois connu des reculs depuis le début des années 1990, puisqu'elle atteignit en 1993 son point culminant avec quelque 8,33 millions de tonnes. En 2001, les deux tiers de la production mondiale étaient représentés par du tabac séché à l'air chaud (flue-cured), du Burley (14%), du tabac noir séché à l'air naturel (10%) et du tabac oriental (8%). Premier producteur de tabac dans le monde, la Chine représente environ 36% de la production mondiale, depuis les années 1980. Avec 2,4 millions de tonnes produites en 2002, la Chine est en même temps le premier pays consommateur de ce produit avec environ 40% des utilisations apparentes mondiales. Cet Etat consomme presque la totalité de ce qu'il produit, puisqu'il n'exporte qu'à hauteur de 2,5% de sa production. Source de revenu importante tant pour l'exploitant que pour les autorités régionales, près de six millions d'exploitations agricoles cultivent le tabac en Chine, selon les chiffres de la FAO. Viennent ensuite les Etats-Unis d'Amérique, l'Inde et le Brésil. Les Etats-Unis, qui fournissent environ 17% de la production mondiale en Burley, occupent le quatrième rang mondial des pays producteurs de feuilles de tabac à 377 000 t en 2003. Le Brésil et l'Inde produisent autour de moyennes annuelles respectives de 385 000 t pour le Brésil et de 465 000 t pour l'Inde. Malgré les ravages que le tabac cause sur la santé publique, les producteurs de tabac préfèrent exhiber le nombre d'emplois que crée cette industrie. Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), l'industrie de tabac emploie quelque 100 millions de personnes de par le monde. Des emplois répartis comme suit : 1,2 million de personnes seulement sont employées dans la fabrication de produits du tabac ; environ 40 millions cultivent et transforment les feuilles ; 20 millions supplémentaires travaillent dans des entreprises artisanales où les cigarettes sont roulées à la main, (Bidis, Kreteks en Inde et en Indonésie), et le reste dans des activités auxiliaires telles que la distribution, la vente et la publicité. Paradoxalement, cette une industrie qui crée, malgré elle, de nombreux emplois, notamment chez des organisations de lutte contre le tabagisme. Le déclin du tabac, selon l'organisation, est expliquée en grande partie par la modernisation des méthodes de culture, l'automatisation des procédés de fabrication et les regroupements d'entreprises, que par le recul de la consommation du tabac, citant l'exemple du Royaume-Uni, où la production de cigarettes a augmenté de 3% entre 1990 et 1998 alors que, dans le même temps, les effectifs ont été réduits de 75%, selon le rapport de l'OIT. Le même rapport explique que les fusions et autres acquisitions dans le secteur poussent au rétrécissement du marché intérieur, l'arrivée à maturité du secteur et le rachat des petites sociétés, qui ont abouti à un quasi-oligopole : trois sociétés seulement contrôlant presque les deux tiers de la production mondiale de cigarettes : China National Tobacco Corporation (CNTC) avec 30%, Philip Morris avec 17% et BAT avec 16%. A en croire les chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le continent africain fera le bonheur des cigarettiers dans les années à venir, étant vulnérables en matière de santé publique et souffrant d'un manque criant en matière de législation adéquate pour faire face à la déferlante des producteurs et des contrebandiers. L'OMS prévoit qu'en 2030 le tabagisme devrait faire sept millions de victimes dans les pays en voie de développement, soit 70 % du nombre total de victimes à l'échelle mondiale. Quant à l'industrie du tabac, l'organisation prévoit une augmentation de 16 % de son marché en Afrique, dans les dix années à venir.Un pays comme le Malawi, qui exporte 98 % de sa production de tabac, s'assure des rentrées en devises de l'ordre de 66% de ses recettes fiscales. De quoi narguer les alertes de l'OMS pour un pays qui peine à sortir du sous-développement !