Après avoir longtemps réfuté une telle hypothèse, et s'opposant fermement à tous ceux qui l'accusaient de vouloir instaurer un régime dynastique, le président égyptien Hosni Moubarak, âgé de 77 ans, a évoqué pour la première fois une possible candidature de son fils cadet Gamal à la présidence égyptienne, selon un quotidien koweïtien. A quelques mois de l'élection présidentielle, et surtout quelques jours à peine après la révision de la loi électorale qui ouvrait la voie à une multiplication des candidatures, cette question est envisagée par celui que ses partisans incitent par une intense campagne à briguer un nouveau mandat de six ans. Il y répond de manière indirecte, mais en tout état de cause, il entend régler lui-même la question de sa succession. « Le président (Moubarak) a affirmé que son fils Gamal pouvait désormais se porter candidat, maintenant que l'amendement de l'article 76 de la constitution a ouvert la porte aux candidatures » multiples, écrit le quotidien gouvernemental égyptien Al Ahram se référant à l'entretien du quotidien koweïtien Al Siyassa. La citation de M. Moubarak ne figure cependant pas en tant que telle dans le corps de l'entretien. Le président Moubarak s'est, jusque-là, constamment prononcé publiquement contre « l'héritage du pouvoir ». « Le président Moubarak ne manifeste plus aucune susceptibilité à ce sujet, maintenant que tout le monde est égal (devant le scrutin) et qu'il ne s'agit plus d'héritage du pouvoir », indique Al Siyassa. « Mon fils peut se présenter comme n'importe quel autre citoyen », a déclaré M. Moubarak, selon le journal. Gamal Moubarak, 42 ans, fils cadet du président égyptien, avait affirmé en mars qu'il n'était pas candidat à l'élection présidentielle prévue pour septembre 2005. « Je ne suis pas candidat. Je l'ai répété à plusieurs reprises. Je le redis encore aujourd'hui », a-t-il déclaré le 23 mars. Jeudi, il avait affirmé « ne pas avoir changé de position sur cette question ». Gamal Moubarak est président du haut comité des politiques du Parti national démocrate (PND, au pouvoir), qui fait office de bureau politique de ce parti. « J'implore Dieu pour qu'il y ait un autre candidat à part moi », a répondu M. Moubarak au rédacteur en chef d'Al Siyassa, Ahmed Al Jarallah, lorsque celui-ci lui a demandé s'il comptait briguer un cinquième mandat en septembre. Le président égyptien, au pouvoir depuis 24 ans, a déclaré qu'il attendait les résultats du référendum du 25 mai sur l'amendement de l'article 76 de la Constitution pour décider s'il se présenterait à l'élection. L'amendement, approuvé par les deux chambres du parlement, permet de tenir pour la première fois des élections au suffrage universel entre plusieurs candidats. L'opposition estime cependant que l'amendement impose des conditions rédhibitoires aux candidats indépendants, et n'hésite pas à parler de verrouillage. Par ailleurs, les magistrats ont renouvelé leurs menaces de ne pas superviser les élections présidentielle et législatives, prévues quant à elles en novembre, s'ils n'obtiennent pas les garanties d'indépendance qu'ils réclament, poursuivant ainsi un bras de fer périlleux et sans précédent avec le pouvoir. Le Club des magistrats, qui tient lieu de syndicat de la magistrature, a cependant décidé de laisser à ses membres la liberté de participer ou non à la supervision du référendum du 25 mai. Le club demande notamment pour la magistrature un budget autonome, indépendant de celui du ministère de la Justice, et le rattachement au Conseil supérieur de la magistrature de l'inspection des services judiciaires. Dans les faits, « c'est le ministère de l'Intérieur qui a aujourd'hui la main haute sur cette inspection », a affirmé Yahia Refai, ancien président de la cour de cassation. Les magistrats demandent aussi que les présidents des principales cours de justice (appel, cassation, administrative et constitutionnelle) soient désignés par le Conseil supérieur de la magistrature et non par le ministre de la Justice, selon un projet de loi adressé à l'Assemblée du peuple. La réunion du club s'est déroulée sous haute surveillance policière. Des partisans du président Moubarak se sont rassemblés devant la salle pour conspuer les « traîtres et les agents de l'étranger ». Des questions fondamentales sont aujourd'hui soulevées et des réponses à peine esquissées. Elles sont liées à l'exercice du pouvoir, mais rien n'exclut une candidature de Moubarak.