Le président de l'Ordre des avocats d'Alger, Me Abdelmadjid Sillini, a étalé, hier, en public le linge sale de la cour d'Alger. De l'attitude méfiante et arrogante de greffiers au mépris délibéré du procureur général, le bâtonnier d'Alger a déballé tout au cours d'une conférence de presse de plus d'une heure, animée, hier après-midi, au palais de justice Abane Ramdane. « Les procédures de défense consacrées par la loi pour que l'avocat puisse assurer une bonne défense à son mandant ne sont plus reconnues, voire interdites, par les différents services de la cour », a-t-il attesté. Selon lui,a les avocats sont devenus persona non grata à la cour d'Alger. « On délimite le champ d'action des avocats. On leur dresse toute sorte d'entraves. Lorsque le justiciable passe devant le juge d'instruction, on lui déconseille de prendre un avocat pour sa défense en lui faisant croire que ce dernier n'y peut rien. On nous a même qualifiés de commerçants. C'est inadmissible », a-t-il clamé, avant d'ajouter : « Il y a une volonté, à Alger, de briser cette profession. » L'animosité envers les robes noires, dira-t-il encore, a atteint un degré insupportable au point que « la présence des avocats aux côtés de leurs clients est devenue circonstance aggravante ». Surtout lorsqu'il s'agit des « agitateurs comme moi », enchaînera-t-il. Me Sillini a souligné, dans la foulée de sa conférence, que « le pourvoi en cassation est maintenant tributaire de l'accord du procureur général. L'avocat ne peut plus retirer le jugement ni faire appel sans la présence du concerné. Il n'est jamais informé à temps que ce soit sur l'instruction de l'affaire, la programmation et le report des procès. On juge ses clients par défaut sans qu'il soit informé. C'est comme s'il n'existait pas ». Cela sans évoquer les scènes d'humiliation et de « terrorisation » des jeunes avocats par des magistrats présomptueux. Me Sillini a également parlé de « violation des droits de la défense ». A ses yeux, « le fait que le ministère algérien de la Justice n'a pas daigné inviter le Conseil de l'ordre du barreau d'Alger à assister à l'accueil de la délégation du ministère français de la Justice, en visite à Alger depuis dimanche 15 mai - alors que les représentants des autres corps de la justice y étaient présents -, démontre à quel point on méprise la corporation des avocats ». Devant cette multitude de problèmes, « les avocats ne peuvent plus accomplir leur mission ». Le bâtonnier d'Alger a dénoncé par là même le refus du procureur général de dialoguer, tout en insistant sur ces pratiques « indignes » d'un Etat de droit. « Cela fait 4 ans que j'ai sollicité le procureur général pour se pencher ensemble sur ces contraintes, en vain », a-t-il regretté. Selon lui, la cour d'Alger leur a interdit de célébrer, le 23 mars dernier, l'assassinat, en 1955, de Ali Boumendjel. Le conférencier s'est dit favorable au dialogue. Et si le dialogue échoue, Me Sillini réunira le conseil, lequel décidera des actions à mener. Pour lui, le boycott des audiences est envisageable.