M. Harchaoui, l'un des cadres les plus influents du RND, a sorti hier ses griffes à l'APN. Il n'a pas été tendre envers la formation de Abdelaziz Belkhadem, plus particulièrement à l'égard du député Abbas Mekhalif, ex-chef du groupe parlementaire de ce parti. Celui-ci, rappelons-le, a critiqué, lundi à l'ouverture des débats sur la déclaration de politique générale du gouvernement, le parti d'Ahmed Ouyahia depuis sa création en 1997 jusqu'à ce jour. Il a également qualifié la déclaration de politique générale du gouvernement de « déclaration générale de politique privée ». M. Harchaoui, en défendant M. Ouyahia qui est chef du gouvernement et secrétaire général du RND, s'est adressé à ceux qui, de son avis, font dans la surenchère en les accusant de passer d'un discours de pouvoir à un discours d'opposition et d'agitation avec de faux d'arguments. « Ce type de discours gêne la cohésion nationale. En revanche, il ne sert ni la démocratie ni le pluralisme, encore moins l'Algérie ou le peuple », a lancé M. Harchaoui qui a rappelé que, au sein même de l'hémicycle Zighoud Youcef et dans d'autres espaces, certains partis politiques, allusion faite au FLN, s'amusent à changer de discours avec le changement de poste, à changer de position avec les changements de responsables et de responsabilités et enfin à changer d'idée et de principe avec les changements et les réductions des avantages et de rente. Le peuple algérien, selon le représentant du RND, a besoin d'une classe politique crédible, fidèle à ses idées et à ses engagements, pour son honnêteté, sa vision et son courage. « Nous sommes tous appelés à réhabiliter l'échelle des valeurs qui est inscrite en bonne place dans l'ordre moral », a indiqué M. Harchaoui qui a au préalable félicité les Algériens pour toutes les réalisations effectuées. « Il faut être conscient des jeux et enjeux à venir », a lancé l'orateur. L'intervention de M. Harchaoui n'a pas été du goût de Abbas Mekhalif qui a jugé que seuls le président de l'APN ou le chef du gouvernement ont le droit de répondre ou de faire des mises au point aux députés. Néanmoins, une demi-heure plus tard, un député du FLN, Nadjib Aïsset, a tiré à boulets rouges sur M. Ouyahia et son parti. Le député a révélé qu'il a été dans l'obligation de revoir le contenu de son intervention afin de répondre à certains élus. M. Aïsset s'est dit persuadé qu'il ne peut pas y avoir de réconciliation nationale tant que l'inégalité des chances existe entre les gouvernants et les gouvernés et aussi tant qu'il n'y a pas de volonté nationale pour demander pardon au peuple. La réconciliation nationale se concrétisera réellement lorsqu'il n'y aura plus personne qui souffre de pauvreté. « Votre bilan est très reluisant, il est malheureusement en contradiction totale avec la réalité », dira l'orateur qui argumentera ses propos avec une réalité amère et désolante. M. Aïsset indiquera qu'à deux pas de l'APN de jeunes adolescents s'adonnent jour et nuit à la drogue ; ils sniffent de la colle, ils consomment de l'alcool ; des enfants accompagnés de leur mère squattent les trottoirs et fouillent les poubelles en quête de nourriture. « Monsieur Ouyahia, si ce décor est implanté dans la capitale, que dire alors des régions situées au fin fond de l'Algérie ? Ceci est un drame et, malheureusement, c'est la vraie face de l'Algérie », dira-t-il. Le RND calme le jeu M. Ben Mbarek, député FLN, s'est attardé sur le secteur de l'éducation. Exhibant des manuels scolaires d'histoire de 2e et 5e années primaires, le député s'est dit outré quant aux fautes qu'il y a dans ces livres. « Trouvez-vous normal qu'au lieu d'écrire Armée de libération nationale, on trouve à la place Armée de libération française. Ceci est scandaleux », fera-t-il remarquer. Saïd Belaïdi, député FLN d'Oran, a proposé le rattachement de la sécurité sociale au ministère de la Santé, dans le but d'accélérer la réforme hospitalière et d'aboutir à la mise en place réelle de la contractualisation. Par ailleurs, tard dans l'après-midi d'hier, les chefs des groupes parlementaires des différents partis sont intervenus. Miloud Chorfi, du RND, serein, tente de calmer le jeu en relevant que la polémique ne sert ni le FLN ni le RND qui composent l'alliance présidentielle et celle-ci est appelée à activer sur le terrain. Le représentant du RND considère le bilan du gouvernement très positif et les chiffres avancés très satisfaisants. Selon lui, les différents secteurs ont connu une progression considérable. Néanmoins, M. Chorfi s'est dit rassuré du fait que le chef du gouvernement n'a pas omis de signaler que des insuffisances existent et qu'il faut y remédier par le travail et la multiplication des efforts des uns et des autres. M. Boumechra, du MSP, a indiqué que le bilan du gouvernement est positif dans sa globalité. Toutefois, il doit être renforcé dans l'avenir puisqu'il y a la mise en place du programme complémentaire de soutien à la croissance et qui a bénéficié d'une enveloppe importante. Dans ce contexte, le MSP craint que le programme en question soit géré de la même manière que celui relatif à la relance économique. Ce dernier a été axé sur des opérations de colmatage et de bricolage. « Nous souhaitons la mise en place des moyens humains et matériels appropriés pour la réalisation des projets retenus et nous refusons les entreprises étrangères déficitaires qui se serviront de nos entreprises pour se refaire une santé », a souligné M. Boumechra, qui n'occultera pas dans son intervention le problème de la délinquance sous toutes ses formes, la criminalité... « La croissance de ces fléaux freinera automatiquement le développement de l'Algérie », a soutenu l'orateur, qui ajoutera sur un autre volet que l'activité politique ne peut se faire que dans un climat de liberté et, de ce fait, la levée de l'état d'urgence s'impose. Sur le plan économique, le représentant du MSP déplore le fait que le pouvoir d'achat des citoyens n'ait pas été amélioré alors que des augmentations ont été opérées sur l'électricité, le mazout... « Cet état de fait poussera la population à se révolter, ce qui affectera l'ordre public et générera des actes de sabotage », conclura-t-il De son côté, M. Daâdouaâ, du FLN, a adressé une série de questions au chef du gouvernement. S'agissant de la Télévision algérienne, M. Daâdouaâ propose sa fermeture, son renouvellement ou la multiplication des chaînes, car l'Unique a échoué, non seulement dans la concurrence vis-à-vis des autres chaînes, mais aussi dans sa mission de service public. « L'unique chaîne est médiocre, elle censure les activités de notre formation et ne dit pas la vérité au grand public », dira-t-il. En s'attaquant au secteur de l'éducation, l'orateur propose la mise en conformité des programmes éducatifs qui sont actuellement inadéquats. Il interroge le chef du gouvernement sur la manière de résoudre les problèmes des institutions financières pour qu'elles soient aptes au changement et au développement. Notons, en outre, que le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, répondra aujourd'hui aux questions et inquiétudes des députés.