Eric Cantonna n'a pas hésité à répondre à nos questions avec cet accent marseillais, quelques heures avant de s'envoler à destination de Paris. Il trouve que l'Algérie est un pays qui respire l'espoir grâce à sa jeune population épatante. Il se prépare pour le tournage en Algérie du film Le Mouton de Bouamari, qui débutera en automne prochain. Ecoutons-le avant qu'il ne prenne de ses affaires pour récupérer sa carte d'accès à bord de l'avion. Bonjour ! Peut-on connaître la raison de votre présence en ce mois de mai en Algérie ? Je viens simplement rendre visite à mon amie, ma compagne, ma fiancée (ndlr Rachida Brakni). Appelez cela comme vous le voulez. Elle est actuellement en plein tournage d'un film en Algérie, intitulé Barakat. Je fais des allers et retours pour nous permettre de passer quelque temps ensemble. Deux mois et demi sans se rencontrer, j'estime que c'est un peu trop. Nous souhaitons vous connaître sur le plan cinématographique ? J'ai tourné dans une dizaine de films, et bientôt sortiront deux autres films. Le premier a pour titre La vie et à nous avec Josiane Balasco et Sylvie Testut. Pour le second qui n'a pas encore un titre définitif, j'ai joué avec Rachida Brakni et le Russe Sacha Bordeau. Depuis la fin de ma carrière de footballeur, je suis satisfait, d'autant plus que ça se passe bien pour moi. S'agit-il d'une reconversion pour Eric Cantonna, le fait d'avoir effectué ce passage du stade de football vers un plateau de tournage ? C'est un autre milieu qui est difficile à pénétrer. Déjà pour un chanteur qui arrive au cinéma, c'est difficile pour lui d'être accepté, comme pour un acteur, il lui est difficile de faire partie du milieu de la chanson. Mais quand on vient d'une discipline sportive, c'est encore plus compliqué. Alors, il nous reste qu'à travailler durement pour faire en sorte d'être accepté dans ce milieu cinématographique. Mais vous avez de la chance, car certainement des gens vous ont permis de pénétrer dans ce milieu du cinéma, n'est-ce pas ? Non, non ! Les gens qui m'ont aidé sont des personnes qui m'ont proposé des scénarios pour pouvoir jouer dans les films. Le cinéma est un travail d'équipe. Après, je sais que beaucoup de personnes nous attendent au tournant quant au résultat. Cela se comprend. Je considère aussi que c'est un privilège pour moi de recevoir ces offres, alors qu'il existe d'autres personnes qui ont fait des formations dans des écoles et des conservatoires pour devenir comédien ou acteur. Je comprends qu'il y a une jalousie à un moment donné de leur part. Le privilège rend des gens sceptiques et c'est à nous de prouver à ces personnes frustrées que nous méritons notre place au cinéma. Je pense qu'il est plus facile de réussir dans le cinéma que dans le théâtre. Le cinéma est aussi une question de charisme, de présence et de regard. Ces critères ne s'apprennent pas au conservatoire, notamment le regard. La caméra dévoile tout ce que l'œil nu est incapable de faire. Je peux vous citer l'exemple de ces femmes qui ne sont pas belles du tout à l'œil nu, mais elles sont totalement transformées et deviennent jolies dans le film. Nous considérons que vous avez réussi votre reconversion, n'est-ce pas ? Je ne suis pas une personne qui copie. Je vis actuellement ma passion. Je vous précise que ce n'est point une reconversion en ce qui me concerne. Je ne suis pas au cinéma pour gagner ma vie et gagner beaucoup d'argent, et je ne suis pas obligé de tourner pour ça. Je répète, j'aime le cinéma et ce que je fais maintenant. Quand je joue dans un film, c'est pour défendre un rôle et l'histoire de ce film. Depuis que je suis gamin, j'avais cette envie de jouer dans un film. Mon imaginaire est très important pour moi, ce qui explique ma réussite dans tout ce que j'entreprends. Quelles sont vos idoles dans le cinéma ? Je n'ai pas d'idoles, mais plutôt des acteurs que j'avais admirés. Je cite Brando, Pacino et Pean. Il existe des acteurs qui ont le charisme et le regard quand ils sont sur le plateau devant les caméras d'une part et d'autre part les techniques de jeu quand ils se retrouvent sur les planches de théâtre. Ils sont des génies. Je pars voir leurs films sans me poser de questions sur l'histoire. Quelle est la différence entre le milieu du football et celui du cinéma ? C'est un monde où il y a beaucoup d'argent. Quand on a affaire à ces deux milieux, il est préférable de vivre en marge avec ses passions que de se laisser aller pour être bouffé par ce système. Certes, je suis un jeune acteur aujourd'hui, mais j'ai cet autre avantage d'avoir vécu 15 années dans un milieu très difficile, celui du football, un peu pourri par l'argent. Il faut savoir gérer toutes les étapes, y compris celui de la popularité. A l'issue de chaque étape, des joueurs disparaissent de la scène et les meilleurs continuent. J'ai l'avantage d'avoir franchi toutes les étapes du milieu du football, cela m'a permis de vivre tranquillement mes passions, bien entendu sans perdre la tête. Avez-vous un ou une partenaire préféré avec qui vous souhaiteriez jouer un film ? Tous les partenaires ont des qualités et des défauts. Personnellement, je n'ai jamais rencontré de problème avec mes partenaires. J'ai commencé à apprendre le métier dès mes débuts au cinéma. Pour moi, le tournant a été incontestablement ce film où j'ai joué avec Rachida Brakni, dans le film intitulé L'outremangeur. Elle fut l'actrice qui m'a apporté le plus de choses. Elle m'a donné ce que j'étais prêt à recevoir, durant un moment où j'étais prêt à donner quelque chose. Ce moment, plus qu'important, passé avec elle m'a permis de mieux m'exprimer. Avez-vous des projets avec le réalisateur algérien Bouamari ? Il m'avais remis le scénario. Je l'ai lu et j'ai trouvé que c'est une belle histoire dans laquelle il y a beaucoup d'équilibre. Le film je le trouve honnête, il n'est ni pro-algérien ni pro-français. Je ne connais pas bien l'histoire entre l'Algérie et la France, mais cela nous amène à mieux la connaître. Bouamari m'a confié un beau rôle. Avez-vous signé un document ? Oui ! Oui ! Je n'ai pas l'habitude de signer des lettres d'acceptation pour les beaux yeux des personnes. Mais je vous le dis, c'est parce que l'histoire du film m'a plu que j'ai donné mon accord au réalisateur Bouamari. Tout ce que je sais pour l'instant, c'est que le tournage aura lieu en automne prochain peut-être. Pour m'aider à m'imprégner de mon rôle dans ce film, je souhaite que le tournage ait lieu en Algérie. Je sais que vous devez partir dans quelques minutes, mais est-ce que vous allez rester dans la peau des acteurs de cinéma ? Sentez-vous qu'en Algérie vous êtes connu ? J'avais déjà produit des pièces de théâtre. Je ne vais pas me limiter à interpréter des rôles dans le cinéma, mais j'ai déjà d'autres idées. Lors de mes furtifs passages dans votre pays, je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer des jeunes ; si c'est le cas, alors c'est bien et j'apprécie beaucoup. Le prochain papier concernera le beach soccer et la formation en football ! Sans problème. Salut et à bientôt !
