C'est à tort que les émeutes d'octobre 1988 ont été présentées comme une révolution démocratique, a déclaré hier le chef de l'Etat à Genève dans le discours prononcé à l'occasion de la 93e session de la Conférence internationale du travail (CIT). Selon M. Bouteflika, il n'y avait pas dans l'Algérie de la fin de la décennie 1980 de demande puissante de démocratie politique émanant de secteurs importants de la société animés par des organisations politiques suffisamment structurées et implantées pour se présenter comme alternative au pouvoir politique en place. Il estime dans ce sens que la société algérienne ne considérait pas l'hégémonie de l'Etat-parti unanimiste et autoritaire comme totalitaire ou despotique. Ceci au point de l'amener à établir que la contestation ne portant presque jamais sur le système politique lui-même mais sur le niveau et les modalités d'accès aux biens distribués par ce système. De là, M. Bouteflika s'en ira aborder l'expérience démocratique algérienne qui a conduit, précisera-t-il, « à une furieuse montée des extrémismes accompagnée d'anathèmes, d'arrogance et de sectarisme ». A certains moments, ajoutera-t-il, cette expérience a mis en danger l'existence même de l'Etat. C'est pourquoi il y a eu le retour sur le devant de la scène des acteurs fondamentaux de l'Etat, en particulier l'Armée nationale populaire, indiquera le chef de l'Etat. Ces acteurs, expliquera-t-il, en arrêtant le processus électoral en janvier 1992 dans un élan patriotique et républicain, stoppent la dérive absurde à laquelle conduisait l'expérience démocratique mais sans arrêter l'expérience elle-même. Toujours selon M. Bouteflika, la majorité des Algériens avait alors rapidement intériorisé la nécessité vitale de la soumission volontaire à la République en tant qu'ordre politique et à l'Etat en tant que garant d'un minimum d'ordre et de stabilité. L'occasion pour évoquer la réconciliation nationale qui consiste à passer, d'après M. Bouteflika, de la « démocratie-structure » à une « démocratie-valeur » largement partagée par tous. Il expliquera que c'est un acte volontaire par lequel l'Etat « réintègre dans la communauté nationale et en tant que citoyens actifs tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont été marginalisés ou se sont marginalisés ». Ceci avec l'objectif d'amplifier et de diversifier le pluralisme aussi bien politique que dans la vie sociale, ajoutera-t-il.