Ahmed Benaoum, directeur du journal Er Raï, a été relaxé hier, en début de soirée, par le tribunal d'Oran. Le procès, entamé vers 15h30, est caractérisé par la présence d'un bon nombre de membres de sa famille, de ses anciens collaborateurs au journal, mais aussi de Ali Yahia Abdenour, président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme, ainsi que de représentants de la délégation de l'ONG Human Rights Watch, dont Olivier Bercault. Appelé à la barre, M. Benaoum, 11 mois de détention préventive, accusé d'évasion fiscale et de faux et usage de faux, a tout d'abord expliqué les conditions de son arrestation pour mettre en avant l'idée d'une machination montée contre lui. « Le 25 juillet 2004, je venais juste de sortir de prison et le 27 on m'a interpellé et on m'a présenté devant le juge d'instruction où on m'a ressorti une affaire qui remonte à 12 ans », a-t-il déclaré. Il s'agit des statuts d'une SARL nommée Express, une entreprise de diffusion qui, a-t-il ajouté, n'a jamais activé et dont le document falsifié ne correspond pas à ce que lui-même avait établi. Pour cette première accusation, il a relevé l'inexistence d'une existence fiscale du fait qu'il n'y a pas eu de registre du commerce et s'est demandé ensuite pourquoi l'administration fiscale a non seulement excepté un document non légalisé et des statuts sur lesquels le nom du gérant se trouve raturé. Quant à la deuxième accusation, il s'agit d'une autre entreprise (EDIOR), mais d'édition cette fois. Il a reconnu que les déclarations mensuelles n'ont pas été établies au profit de l'administration fiscale, mais un bilan annuel mentionnant un chiffre d'affaires de près de 9 millions de dinars a été présenté. Cette anomalie a été mise sur le compte de l'inexpérience, des difficultés liées au recouvrement (le cas du domaine de la distribution) et d'une période très dure caractérisée par l'insécurité due au terrorisme. La partie civile, représentée par un cadre de l'administration des impôts Oran-Est, s'est interrogée sur les changements d'adresse de l'entreprise. Pour le prévenu, « la loi oblige de toutes les façons les entreprises de presse à mentionner les adresses sur les publications ». Et c'était pour dire q'il n'y a pas eu volonté de fuir les responsabilités, mais les déménagements étaient dus à des difficultés matérielles. Le premier témoin, un agent de l'administration fiscale appelé à la barre, a dit ne pas avoir vérifié si la première entreprise a activé ou pas. Le dossier a été sorti des archives sous l'insistance, avoue le deuxième témoin, également agent de la même administration, de son sous-directeur. La partie civile n'a pas également expliqué comment le dossier de la SARL Express, à ne pas confondre avec l'entreprise Express-diffusion datant de 2000 et où le groupe de M. Benaoum est seulement actionnaire majoritaire, ait pu resurgir subitement 12 ans plus tard. Le représentant du ministère public s'est basé sur le fait que « personne ne peut pénétrer dans les locaux de l'administration pour déposer un faux document ». Lorsqu'il a requis 5 ans de prison, une femme, membre de la famille du prévenu, et une ancienne collaboratrice ont laissé couler des larmes. L'aspect politique (ou complot ) de l'affaire a été évoqué par le premier avocat qui a dit de son mandant qu'il était malgré tout confiant en la justice. Il a parlé du journal Er raï, créé après l'hebdomadaire Détective (incriminé par les impôts), et son style particulier. « Tout d'un coup, plusieurs administrations se sont empressées de déposer des plaintes contre le patron de ce journal, plusieurs fois accusé de diffamation », avait-il déclaré pour ensuite penser qu'« il fallait à tout prix lui trouver quelque chose de plus grave, car il a été interpellé à maintes reprises autant chez lui que dans la rue et même au tribunal d'Es Sénia ». Le deuxième avocat s'est intéressé au document falsifié pour démontrer la non-responsabilité de son client en se basant sur le rapport du notaire qui en a rédigé le contenu. On y reviendra dans notre prochaine édition.