A l'initiative de la Fondation 8 Mai 1945 a été commémoré hier, à la Bibliothèque nationale d'Algérie (BN), à Alger, le 160e anniversaire de l'enfumade du Dahra (Mostaganem). Entreprise génocidaire coloniale qui a frappé la tribu des Ouled Riah. Outre le documentaire de 30 minutes retraçant cette tragédie, ont été animées en la circonstance des conférences. Le documentaire en question a été réalisé en 1993 par A. Mostefa au profit de la Fondation 8 Mai 1945. Il est intitulé Nekrama. Il s'agit du nom de la grotte où la population des Ouled Riah, pour la plupart des femmes, des enfants et des vieillards, est anéantie le 19 juin 1845. Opération dirigée par le colonel Pélissier, qui a agi sous les ordres du général Bugeaud. Ce dernier lui a recommandé, à voir le documentaire, de recourir à cette méthode déjà utilisée en 1844 par Cavaignac contre la tribu des Sbeha dans la même région. « Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, imitez Cavaignac comme il l'a fait aux Sbeha. Enfumez-les à outrance comme des renards », a ordonné Bugeaud à son subordonné. Au lendemain de la tragédie, il est dénombré 760 cadavres entassés sous leurs bovins et autres animaux domestiques, selon les témoignages d'un soldat. Le chiffre officiel est de 500, mais d'autres témoignages font état de 760 ou de plus de 1000 morts. « Le matin, quand on chercha à dégager l'entrée des grottes, gisaient des bœufs, des ânes, des moutons ; parmi les animaux, entassés sous eux, on découvrait des femmes, des hommes, des enfants... On a dénombré 760 cadavres », selon le témoignage d'un soldat. Le documentaire a évoqué aussi l'enfumade du 12 août 1845 perpétrée par Saint Arnaud à Ténès. Ainsi que l'enfumade dont furent victimes les Sbeha. Suit la conférence de Redouane Aït Tabet (historien) qui fait le parallèle entre l'enfumade du 19 juin 1845 et les événements du 8 mai 1945. « Dans les deux situations, tragiques, il est relevé, entre autres, le fait que les forces coloniales se sont attaquées à des civils sans arme. Il s'agit ainsi de crimes de guerre. En 1845, la résistance algérienne aux forces coloniales était faible. En outre, ces forces coloniales sont passées de 40 000 soldats en 1840 à 110 000 en 1846 », explique le conférencier. De son côté, l'avocat Mustapha Bouchachi constate qu'à voir le documentaire, ces enfumades constituent des crimes contre l'humanité. Et cela si « on se réfère aux textes des tribunaux de Nuremberg et de Tokyo mis sur pied par les Alliés pour juger les criminels de l'Allemagne nazie et des autres pays de l'Axe. Ces enfumades constituent des crimes contre l'humanité. Ainsi que du point de vue du droit international ».